Carnet d’entraînement : La compréhension du jeu

06/12 - 15:40 | Il y a 7 ans
Carnet d’entraînement : La compréhension du jeu

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Mercredi 6 décembre 2017 - Le Haillan : À deux jours de recevoir Strasbourg, les Girondins ont travaillé les attaques sans opposition en partant de la défense. Sous un froid glacial, les entraîneurs ont insisté sur l’adaptation aux situations de matchs et sur les solutions à apporter.

Seuls huit supporters sont présents en comptant les habituels retraités présents pour refaire le monde en ce mercredi 6 décembre 2017. Un brouillard à couper au couteau enveloppe le Haillan. Les quelques toiles d’araignées qui sont accrochées aux grillages qui protègent le terrain d’entraînement sont gelées par un froid glacial. Pas de doute, si Bordeaux est dans le dur sportivement, le cadre autour de l’entraînement s’adapte parfaitement aux résultats. Quelques journalistes ont mis le nez dehors et attendent l’arrivée des joueurs. Sur le terrain, ce sont des mannequins qui sont disposés à divers endroits et que l’on perçoit à peine. Tout juste est-il possible de deviner que les joueurs vont travailler sur la totalité du terrain, fait assez rare à deux jours d’un match de championnat.

Devant les vestiaires, des silhouettes de joueurs apparaissent. Vagues, furtives. Les ballons tapotés laissent deviner une mise en éveil légère des organismes à base de petites passes. Quelques rires rassurent sur l’absence de morosité d’une équipe mal en point. À l’opposé des spectateurs, Igor Lewczuk longe le terrain, deux planches grillagées en mains, et conduit un ballon au pied en marchant. Pendant que les gardiens partent s’isoler à l’opposé des vestiaires, le groupe entame un tour de terrain. Les joueurs discutent en courant. Les cache-cous sont de sortie, quelques rares joueurs comme Jaroslav Plasil ont opté pour le short, mais la plupart sont en pantalon de survêtement. Jonathan Cafú, en queue de peloton, semble transi de froid. Le tour de terrain est rapide, et les joueurs reviennent du côté des vestiaires. « Trois minutes libres » annonce Kévin Plantet le préparateur physique des Girondins. Les aller et retour s’enchaînent et les joueurs gèrent la suite de l’échauffement grâce à tout l’arsenal à disposition permettant de préparer leurs corps grâce à des mouvements continus.

Au milieu des mannequins, avec du recul par rapport aux joueurs, Jocelyn Gourvennec et Eric Blahic débattent sur le coeur de la séance à venir. Pereira, à l’arrêt, fait bouger ses genoux via des mouvements circulaires en resserrant ses jambes. Tout est bon pour déverrouiller les articulations sous ce froid freinant la mobilité. Trois groupes se forment pour les habituels toros de début de séance. Une touche de balle est demandée dans la circulation du ballon. Kévin Plantet donne le ton : « Restez en mouvement, mettez de la vie. » Les coachs observent de loin. Eric Blahic donne un premier coup de semonce de sa position depuis le milieu du terrain : « Bougez, oh. » L’entraîneur adjoint s’approche et intervient à mesure qu’il rejoint le groupe : « Restez actifs. Soyez dynamiques. Il y a trop de joueurs sur les talons. » À l’opposé, Lewczuk qui a opté pour le short malgré le climat un peu rude exhibe un bandage noir en dessous du genou. L’international polonais travaille avec le kinésithérapeute David Das Neves. Dans son dos, les gardiens mettent de la vie dans leur séance en jouant deux contre deux dans un tennis-ballon revisité où la tête et les pieds sont accompagnés des mains. 

Le groupe qui en a terminé avec les toros vient à la rencontre de Jocelyn Gourvennec au milieu du terrain. Chacun écoute avec attention les premières consignes de l’entraîneur puis se saisit soit d’une chasuble blanche, soit d’une chasuble rose posée sur le sol. Les joueurs se mettent en place. L’équipe blanche sera la première à jouer tandis que l’équipe rose est disposée à divers endroits du terrain au niveau des mannequins. Lorsque l’une des deux équipes attaque, l’autre équipe n’intervient pas. Benoît Costil garde la cage de l’équipe qui travaille et tient le rôle de premier relanceur sans avoir d’arrêt à effectuer tandis que Jérôme Prior, en face, subit les attaques. Chez les blancs, Toulalan et Pellenard forment l’axe central. Sabaly évolue à gauche et le jeune Thomas Carrique à droite. Otávio est associé à Sankharé devant la défense. Vada est en position de meneur de jeu avec Youssouf à sa gauche et Cafú à sa droite. Mendy est seul en pointe. Chez les roses, Koundé est axe droit associé à Poundjé. Contento prend le côté gauche et Gajic le côté droit. Lerager et Plasil sont au milieu de terrain. Pereira est devant eux avec De Préville et Taha à ses côtés. François Kamano est l’attaquant de pointe de ce dispositif.

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Chaque joueur est à sa place et écoute les dernières consignes prodiguées par Eric Blahic. Le jeu se déroule face au centre d’entraînement. Le but est rejouer des systèmes déjà travaillés les dernières semaines en partant de la défense et en cherchant à attaquer seulement lorsque des décalages évidents ont été constitués grâce au positionnement des joueurs. Si le décalage n’est pas trouvé, le jeu doit repartir à l’opposé. Avant de débuter Jocelyn Gourvennec apporte une dernière précision : « Les portes de sortie elles sont sur les ailes, c’est pour cela qu’on veut aller vite sur les côtés. » Le jeu débute et Eric Blahic serre le jeu d’entrée : « Pourquoi on n’est pas actifs ? » Dès la première action avortée et la relance de Prior pour la charnière centrale à l’opposé, Eric Blahic remarque que ses joueurs ne se reprennent pas leurs positions de départ et recadre les choses.

Deux temps de jeu plus tard, Jocelyn Gourvennec siffle et arrête le jeu. L’entraîneur bordelais corrige le placement de ses joueurs au milieu de terrain. Pour l’ancien technicien guingampais, il est impératif que les deux récupérateurs ne soient pas sur la même ligne. « Si l’un des deux milieux est bas, l’autre doit être un cran plus haut » souligne l’homme fort des Girondins qui mime le positionnement du deuxième milieu. « Là on est équilibrés et on peut jouer » précise Jocelyn Gourvennec. Sur une action validée par le staff, Mendy marque en taclant. Une attitude qui plaît à l’entraîneur des Girondins : « Bien joué Alex, ça c’est déterminé. » Eric Blahic oriente constamment les joueurs, les avertissant lorsqu’un départ d’attaque semble incohérent et serait bloqué par l’adversaire en match. Les joueurs doivent changer le jeu. La clef de l’exercice est de réussir à créer une possibilité d’attaque par des décrochages permettant aux joueurs d’évoluer dans des zones différentes en opérant en décalages. Si Vada décroche, il permet à Sankharé de jouer en une-deux et d’orienter le jeu sur une aile. Si Cafú sollicite le ballon à l’intérieur, il peut libérer le couloir pour Carrique.

Lorsque le jeu est à plat avec un mouvement minimaliste, les coachs demandent un changement rapide. « Théo, trouvez de la largeur entre les deux centraux, il faut que votre passe élimine deux joueurs d’un coup » demande Eric Blahic à Pellenard. Suite à un centre de Sabaly, Vada marque du plat du pied au premier poteau avant qu’Eric Blahic n’arrête la séance. L’entraîneur adjoint détaille les situations d’attaques qui ne sont pas cohérentes par rapport à une situation de match. On demande aux défenseurs centraux de prendre parfois l’initiative d’avancer de manière franche pour jouer ensuite un décalage direct sur l’aile et de varier les possibilités de lancer les attaques. Un dédoublement entre Mendy et Vada aboutit à une passe pour Carrique lancé sur l’aile. Ce dernier centre au deuxième poteau. Youssouf marque d’une frappe poteau rentrant. « Il faut que le joueur à l’opposé ferme au deuxième » remarque Eric Blahic. « Qui décroche ? Milan ! » crie l’entraîneur adjoint Bordelais qui attendait une proposition de Gajic sur une phase d’attaque des roses. Les entraîneurs arrêtent souvent le jeu, replacent, expliquent. C’est un véritable travail de couture qui s’opère. « T’es à l’arrêt Thomas, t’as pas d’orientation vers l’avant » peste Eric Blahic qui demande à Carrique de faire repartir le jeu avec ses milieux pour changer de côté. Du côté des roses, Plasil tente une transversale gagnante pour Taha rentré légèrement intérieur côté droit. Le jeune girondin tente une remise de l’extérieur du pied en une touche au rebond du ballon. Gajic intercepte le ballon freiné par un geste mal assuré, déborde et centre, mais Jocelyn Gourvennec, à l’opposé, n’a pas apprécié la passe de Taha : « Mieux que ça Ervin ! » Eric Blahic appuie son entraîneur après que Kamano a marqué sur cette action: « Ervin, tu crois que ça passe ça ? Ça ne surprendrait même pas le mannequin. »

Dès qu’Eric Blahic déclare que le jeu est bouché et qu’un couloir est potentiellement bloqué par l’adversaire, on cherche à changer. Jocelyn Gourvennec arrête de nouveau le jeu et précise comment se sortir de la nasse lorsque l’adversaire verrouille un côté. Si le jeu se déroule à droite, dès que Toulalan dispose du ballon en défense centrale, Cafú doit rentrer à l’intérieur, libérer l’espace pour Carrique qui déboule à vide pour monopoliser l’attention adverse, et jouer avec Otávio une fois le ballon reçu. Le milieu bordelais peut ensuite effectuer une transversale. Vada est chargé d’interpréter pour expliquer le principe à Cafú. Le milieu offensif brésilien échange avec son coéquipier. Le débit de paroles s’accélère à mesure que le joueur bordelais n’est pas dans le bon tempo pour réaliser son appel de balle. À force de répétitions, ce mode de sortie de balle commence à rentrer dans les automatismes des joueurs. « Trouvez entre les lignes » insiste inlassablement Eric Blahic. « Bien joué Lukas, faites semblant » se réjouit l’entraîneur adjoint bordelais devant une transversale de Lerager qui avait caché sa passe avant de l’exécuter. 

Après une dernière frappe arrêtée par Prior, Jocelyn Gourvennec siffle la fin de la séance. « Venez ici » demande l’entraîneur bordelais qui se trouve à l’opposé du grillage derrière lequel sont positionnés les spectateurs. Les joueurs, toujours silencieux, sont regroupés autour de leur entraîneur. Celui-ci explique le lien de cette séance avec le match de vendredi face à Strasbourg où il sera essentiel de rapidement faire bouger le jeu, notamment sur les côtés. « Allez les jeunes, enlevez les mannequins » demande Jocelyn Gourvennec à la fin de son débriefing. Deux ateliers se forment spontanément. D’un côté Pellenard et Carrique adressent des centres pour Gajic, Toulalan, Plasil ou De Préville avec Poussin dans les cages. De l’autre, Youssouf et Pereira tirent des coups-francs face à Mandanda qui doit aussi faire face à Kamano ou Mendy qui prennent appui sur une planche avant de jouer en une-deux avec Eric Blahic et de frapper. Les joueurs en ont encore sous la semelle et ont des fourmis dans les jambes malgré l’heure et demi de travail. Un signe favorable avant un nouveau rebond attendu vendredi face à Strasbourg ?

Par Florian RODRIGUEZ au Haillan

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