Carnet d’entraînement : Feu, partez !

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Jeudi 10 mai 2018 - Le Haillan : Avant de recevoir Toulouse pour un match essentiel pour la qualification en Europa League, Gustavo Poyet a fait travailler son équipe face aux buts. Les joueurs offensifs ont été les principaux concernés avec des séries de six frappes successives pendant l’essentiel de leur séance.
Le cadre pourrait être identique aux semaines précédentes, à deux jours d’un match de championnat le weekend. Il pourrait mais ne l’est pas. Si le terrain d’entraînement, près du parking visiteurs est de nouveau celui qui va être utilisé par les joueurs de Gustavo Poyet pour s’entraîner, la séance s’annonce différente. Deux cages se font déjà face sur un demi-terrain. Idem pour la deuxième partie de terrain. Le temps ensoleillé et les files de tennis-ballon qui se prêtaient à une ambiance de barbecues et de claquettes, signe d’une fin de saison en pente douce, a laissé sa place à des nuages et quelques gouttes de pluies éparses comme venus rappeler que l’heure de se relâcher n’était pas encore sonnée. Dans la foulée de la camionnette blanche transportant le matériel et se stationnant toujours près de l’entrée du terrain, les joueurs arrivent en courant, à coups de crampons bien décidés. Gustavo Poyet, déjà sur le terrain, regarde le ciel avec circonspection. Mauricio Taricco, de manière volontaire, avec une sorte de grinta sud-américaine à peine cachée, tape énergiquement dans les mains des joueurs qui arrivent sur le terrain. Paulo Grilo, l’entraîneur des gardiens, va à la rencontre de Benoît Costil. Les deux hommes se saluent puis s’enlacent chaleureusement à l’initiative du technicien bordelais. Gustavo Poyet, dirigé vers l’entrée du terrain, serre vigoureusement les mains de ses joueurs. Malcom, lui, tape la main de son entraîneur avec détermination. Une complicité semble être née entre le joueur brésilien et le coach uruguayen. L’ambiance est à la motivation.
Temps gris sur le Haillan où les Girondins s'entraînent ce matin #LiveWG pic.twitter.com/PK4BQxvlNb
— Web Girondins (@webgirondins) 10 mai 2018
Les supporters, eux, ont répondu présent et garnissent la main courante, prenant soin de poser délicatement leurs avant-bras sur ces barres parsemées de gouttelettes d’eau. Après avoir tapoté les ballons librement, les joueurs rejoignent Eric Bedouet face à l’entrée du terrain pour entamer quelques longueurs d’échauffement. Toute la panoplie est de sortie : petits pas et légères accélérations, montées de genoux, pas chassés en miroir et dos tourné avant d’accélérer sur les derniers mètres. La plupart des joueurs ont opté pour des hauts imperméables couleur bleu marine et à manches longues. Fernando est contraint d’ouvrir la camionnette pour permettre à Gaëtan Poussin de récupérer une petite trousse avec quelques affaires d’entraînement. Alors que les gardiens s’apprêtaient à débuter leur échauffement à l’opposé des joueurs de champ, Paulo Grilo taquine son jeune gardien qu’il avait accompagné pour chercher son matériel : « Tu ne pouvais pas y penser avant » interroge en Français le technicien portugais tout en donnant une tape paternaliste derrière la tête à son joueur, mimant une sorte de courroux, léger sourire aux lèvres. L’ambiance est décidément au beau fixe entre les joueurs et leur staff malgré le temps un peu morose. Les gardiens débutent alors leur échauffement, deux par deux, s’envoyant des ballons de près du pied jusqu’à la main. Les habituels Costil, Poussin et Mandanda sont là, épaulés aujourd’hui par le jeune Corentin Michel.
Les joueurs de champ se sont saisis de chasubles rouges et répartis en trois groupes de toros, près des buts situés à quelques mètres de leur lieu d’échauffement. Des spectateurs, en nombre, sont venus longer le terrain adjacent inoccupé pour se placer derrière les filets de protection du terrain et pouvoir observer les joueurs de plus près. Mauricio Taricco participe au toro au sein du groupe des Sud-Américains. C’est d’ailleurs ce groupe composé de Pablo, Vada, Malcom et consorts qui se fait le plus remarquer, manifestant régulièrement sa joie comme des enfants de l’école de football en train de découvrir ce jeu. Pablo chambre Vada en lui mettant la chasuble au visage au moment d’échanger les rôles. Les deux autres groupes sont plus calmes. Plus loin, les gardiens montent en intensité. L’un d’eux, dans les cages, se situe au niveau de l’un de ses poteaux. Un coéquipier placé au point de pénalty lui envoie une volée que le titulaire de la cage doit capter avant de se tourner vers Paulo Grilo, situé sur le côté, et équipé d’une petite planche à grilles très fines dont il se sert comme d’un bouclier pour renvoyer le ballon. Les retours sont à chaque fois aléatoires et obligent le gardien à s’adapter : une fois dans les pieds, une fois à toute vitesse côté opposé, une fois avec rebond pour partir sous la barre. « Magnifique » s’exclame Paulo Grilo avant de taper dans la main de Poussin. « Oh Mandanda » tonne de nouveau le technicien des goals avec un accent et un ton enjoué caractéristiques.
Gustavo Poyet siffle et incite les joueurs à le suivre au milieu de terrain. La plupart s’arrêtent au niveau du charriot contenant les bouteilles d’eau pour s’hydrater. Deux groupes distincts se forment à mesure que le technicien uruguayen égraine les noms. Très rapidement, on constate que les joueurs offensifs vont travailler entre eux, côté entrée du terrain. Malcom, Kamano, Cafu, De Préville, Braithwaite, Vada et Laborde commencent à s’échanger quelques passes simples. De l’autre côté du terrain, une opposition libre s’apprête à débuter. Poussin garde les cages de l’équipe jaune composée de Lewczuk, Baysse, Sabaly, Meïté, Koundé, Youssouf, Contento et Plasil. Face à eux, Costil sera le gardien d’une équipe dont feront également partie Tchouaméni, Otavio, Pellenard, Pablo, Poundjé, Verdon, Lerager et Gajic. Du côté des attaquants, deux gardiens occupent les deux cages : Corentin Michel dos aux filets de protection du terrain, et Over Mandanda en face, distant, d’une vingtaine de mètres. Gustavo Poyet, se situe au milieu d’une armée de ballons, au centre de ce terrain, et regroupe ses joueurs pour leur expliquer le travail. Très vite, les ballons sont répartis au quatre coins du terrain, et les joueurs aussi. Deux joueurs sont situés sur les côtés, un sur chaque aile. Quatre autres sont disposés chacun à côté de l’un des poteaux de chaque gardien. Au centre, un attaquant a six possibilités de frappes et Gustavo Poyet, en annonçant le prénom du passeur, ne laisse aucune indication au frappeur pour se préparer. Ce dernier peut avoir, selon la provenance du ballon, à frapper sur la cage de Corentin Michel ou sur celle d’Over Mandanda. « Malcom, François, Cafu, Nico. » L’entraîneur girondin enchaîne et commence fort. Braithwaite, au centre, inaugure la séance et doit faire feux de tout bois. C’est au tour de Valentin Vada. Le milieu offensif argentin enroule un ballon bien boxé par le jeune Michel puis rate un contrôle avant de frapper à côté. Après deux nouvelles frappes hors-cadre, la dernière, rasante, trouve les filets de Mandanda. Peu en réussite, Vada quitte sa position de frappeur en râlant, stigmatisant la qualité des passes pas assez qualitatives à son goût et s’en va prendre place, ronchonnant, à côté du poteau de Corentin Michel, mains sur les hanches.
« Contrôle, but » encourage Gustavo Poyet, mâchoire serrée, alors que Gaëtan Laborde est à la manœuvre, mais la première frappe est solidement boxée par Corentin Michel. Le jeune gardien belge des U19 au physique très fin et à la taille plutôt modeste au regard des gabarits de certains gardiens actuels, fait très bonne figure d’entrée de jeu et s’impose en maître dans sa cage, dégageant même de la puissance sur des arrêts suite à des frappes sèches de ses coéquipiers professionnels. Laborde loupe un premier ciseau qui sort, avant de marquer sur une autre tentative du même genre imparable pour Mandanda. Un geste qui génère quelques applaudissements en bord de terrain. La réussite est comme souvent aléatoire dans ce type de séance depuis que Gustavo Poyet a imposé ces exercices de frappes sans relâche à quelques jours des matchs. Kamano marque d’une frappe sèche sous la barre, tape largement au dessus, puis enroule et trouve la lucarne. « Décision François, dernier marque » harangue Gustavo Poyet, mais la frappe sèche de l’international guinéen est sortie avec un plongeon horizontal d’un Michel plein d’autorité. Gustavo Poyet ne laisse aucun répit et les joueurs au centre changent très rapidement. Cafu écrase ses cinq premières frappes qui sont sans danger pour les gardiens, avant de marquer sur son dernier tir de ce style, trouvant l’intérieur du petit filet de Corentin Michel. Paulo Grilo appelle Over Mandanda et le presse d’échanger sa place avec Gaëtan Poussin qui oeuvrait au sein de l’opposition. Les deux gardiens échangent très rapidement leurs positions car le jeu ne s’est arrêté d’aucun côté, mais font l’effort de croiser leurs chemins pour se taper dans la main.
Au niveau de l’opposition, les occasions de but sont plus rares car les joueurs présents sur le terrain sont tous à vocation défensive. Verdon tente tout de même une frappe un peu lointaine sortie au sol par Costil. Paulo Grilo qui observe plus particulièrement le comportement de ses gardiens sur ce match s’enthousiasme de nouveau avec un « bien joué Costil ». Chez les attaquants on continue sans relâche. Cafu poursuit ses frappes à ras-de-terre, trouve un poteau et marque deux fois. Les joueurs doivent s’adapter à chaque ballon, qu’il vienne de côté ou face à lui car les passes sont libres. Les frappes se font le plus souvent après des amorties. Laborde place une frappe très lourde prenant la direction de la lucarne mais Poussin exécute une manchette qui détourne le ballon de sa trajectoire. Les joueurs de l’opposition font une pause, et prennent le temps de boire tout en observant de près leurs partenaires de l’attaque. La réussite reste toujours aléatoire. De Préville place deux reprises acrobatiques au dessus du but. Malcom manque une volée et place une frappe qui fuit aussi le cadre. Kamano est dans la même veine, marquant une première fois avant de réussir une volée enroulée magnifique puis de rater ses trois tentatives suivantes. L’exercice évolue, et ce sont désormais trois joueurs par côté qui doivent envoyer des centres, soit côté Michel, soit côté Poussin. Le but est de marquer de la tête, mais en cas de ballon trop bas, il est également possible de frapper. « C’est important des bons ballons » insiste Gustavo Poyet.
Nicolas De Préville est contraint de frapper et marque sèchement près du poteau face à Michel avant de se retourner et de placer une tête plongeante sur la barre de la cage de Poussin. L’exercice est physique depuis le début de la séance puisqu’il oblige les joueurs à être sur le qui-vive et à changer sans cesse d’orientation. Malcom qui a tout de même gratifié le public de quelques buts bien sentis malgré un peu de déchet, manque le cadre à trois mètres du but de Poussin après un contrôle long. Le gardien girondin lui tape amicalement derrière la tête, mais le joueur brésilien semble contrarié après lui-même, fronçant les sourcils tout en allant se replacer côté spectateurs avec les centreurs. Gustavo Poyet prend de temps en temps l’initiative de faire le joueur d’opposition gênant la course de ses attaquants. Kamano rate son contrôle mais s’engage pleinement vers Corentin Michel qui n’hésite pas à sortir avec détermination et à plonger dans les pieds de l’attaquant en poussant un « ouais » plein d’autorité. « Valé… » Martin Braithwaite s’agace légèrement après Valentin Vada, qui, en position de frappeur n’est pas allé sur un ballon, mais marque d’une frappe rageuse dans la lucarne de Poussin après plusieurs échecs. Gaëtan Laborde qui avait effectué un centre fuyant rebondit : « Valé, si tu y vas tu y vas. » Vada râle, ronchonne de nouveau, critique la qualité du ballon et va se replacer à l’opposé, visiblement encore sous le coup de l’énervement. Laborde et Braithwaite, continuent d’échanger sur la réaction de leur coéquipier, avec un peu de surprise, mais vraisemblablement d’accord d’un point de vue technique.
« C’est moi, c’est moi. » Martin Braithwaite s’excuse après un centre mal adressé à Nicolas De Préville. L’opposition, elle, s’est arrêtée, et Pablo est le premier à se diriger vers la sortie du terrain, en marchant. Le départ du défenseur brésilien déclenche des mouvements de supporters vers la sortie afin de ne pas louper le joueur. Deux mannequins, dans l’axe mais en décalé, on été installés à l’endroit où l’opposition se jouait, sur le but le plus au fond du terrain occupé habituellement par Benoît Costil. Fernando effectue une passe entre les deux mannequins, un contrôle orienté est effectué pour s’écarter et une frappe est donnée. L’ambiance est tranquille et seuls ceux qui le voulaient sont restés sur cet exercice. Sabaly et Poundjé se sont rapprochés de De Préville en position de centreur et blaguent avec lui. Sur la même moitié de terrain, mais à l’opposé des spectateurs, deux groupes se font formés. L’un au niveau du milieu de terrain composé de Lewczuk, Contento et Gajic, l’autre près de la ligne de six mètres formé de Baysse, Pellenard et Verdon. Le début du jeu se fait par un ballon levé touché hors du sol par les trois joueurs avant d’allonger pour le groupe opposé. Un joueur doit contrôler, toujours en l’air, et faire toucher le ballon aux autres. Le dernier fait retomber le ballon au sol, et on repart sur le même schéma.
Les attaquants ont changé leur façon de frapper. Tous regroupés au milieu, ils doivent frapper de loin sur la cage de Corentin Michel après un dribble court. « Tranquille, prenez votre temps » demande Gustavo Poyet. Gaëtan Poussin qui alterne avec Corentin Michel dans les buts, s’est retourné le doigt et se fait examiner par l’un des kinés du club. Solide, le jeune gardien remet ses gants et revient dans le but. Gustavo Poyet vient s’enquérir de sa santé avant de le taquiner et de repartir se placer au niveau de ses attaquants. Poussin sort une frappe puissante de Vada en se couchant au sol. Ce dernier tente une lobe en feuille morte dans la foulée qui passe légèrement au dessus. Sur son passage suivant, Vada se refait et enroule dans la lucarne. Un passage à l’image de sa séance, entre gros ratés et quelques gestes réussis et spectaculaires. Les autres attaquants terminent eux aussi sur la même cadence avec des réussites très aléatoires. Même si Gaëtan Laborde enroule du pied gauche et trouve la lucarne gauche avant que Braithwaite en fasse de même de son pied droit pour la lucarne droite.
Au fond du terrain, les milieux et défenseurs encore à pied d’oeuvre jouent un une-deux avec Bedouet avant de passer à Fernando, légèrement décalé, qui remet à l’intérieur pour une frappe au but. Costil et Mandanda se succèdent pour faire face à ces frappes. La pluie commence à tomber légèrement. Les frappeurs s’essoufflent un peu. Vada et Laborde frappent au dessus. Seul De Préville casse la série en marquant d’un tir qui fuse et trouve le petit filet intérieur. Les attaquants se lèvent désormais le ballon avant de frapper. Dans cet exercice difficile, De Préville marque dans le petit filet opposé à celui de son tir précédent. Braithwaite est le premier des attaquants à mettre fin à sa séance et à se diriger vers la sortie.
Il y a du monde un peu partout. La situation géographique du terrain, le peu d’agents de sécurité présents, et la nombre de personnes aux abords empêchent d’aseptiser les contacts avec les joueurs qui se retrouvent nez à nez avec les spectateurs. C’est naturellement que les photos et autographes se font, comme du temps où les vestiaires des joueurs se situaient au sein du château et où les spectateurs pouvaient librement échanger avec les joueurs avant et après la séance, sans gêne pour les footballeurs professionnels. Sur le terrain, l’entraînement est terminé pour les attaquants. Malcom et Cafu, près de la main-courante, effectuent quelques passes longues et le premier nommé n’hésite pas à mettre les mains lorsque les passes de son coéquipier prennent des trajectoires dangereuses pour le public. De Préville, Meïté, Kamano et Laborde continuent à frapper en s’adonnant pendant quelques moments à des coup-francs. Pendant que Benoît Costil se rapproche pour la première fois de la séance du public en prenant la direction de la sortie, lui qui était isolé dans son but fétiche à l’extrême limite du terrain, Mandanda garde la fameuse cage en s’opposant à des tirs de pénaltys. Otavio et Cafu font du rab physique avec Eric Bedouet comme ils en ont l’habitude depuis plusieurs semaines. Les deux Brésiliens placent des accélérations courtes, avant de finir en relâchant et en partant dans la direction opposée, accompagnés par Mauricio Taricco. Chacun termine la séance à sa sauce, et les joueurs ne sont pas spécialement pressés de quitter la pelouse. Dans une ambiance plutôt volontaire, les Girondins ont donc préparé le dernier match de la saison à domicile face à Toulouse, pour peut-être s’offrir une chance de disputer une place européenne lors de la dernière journée à Metz. Une chance inespérée après des mois de rebondissements pas toujours heureux.
Par Florian RODRIGUEZ au Haillan