Carnet d’entraînement : Presque une routine

© Iconsport
Jeudi 26 avril 2018 - Le Haillan : Toros, oppositions libres pendant que d’autres joueurs frappent dans différentes positions ont rythmé une séance très classique pour une avant-veille de match sous Gustavo Poyet. Sous une intensité un peu moins élevée qu’il y a une semaine avant la réception du PSG.
Un beau soleil, un entraînement sur le terrain en contrebas du parking des supporters, un public un peu étoffé et des trois groupes de joueurs effectuant des toros près de la main-courante. La photographie ressemblerait à s’y méprendre à celle de la semaine précédente avant la réception du PSG. Quelques visages ont cependant changé. Diego Contento n’est pas sur le terrain, et Milan Gajic, Olivier Verdon et Zaydou Youssouf, eux, sont de la partie. Pendant que les ballons tournent au sein des toros, les gardiens se sont exilés au bout du terrain. « Va va Pablo ». Gustavo Poyet, longiligne, teint toujours aussi halé, observe ses joueurs et les reprend ponctuellement, les bras croisés devant lui. Les joueurs s’applaudissent, rient aux éclats, comme lors d’une semaine suivant une belle victoire en championnat. Une odeur d’herbe fraîchement tondue monte au nez grâce à un tracteur s’échinant à donner une belle coupe d’été à l’un des terrains adjacents. Au loin, Paulo Grilo donne des coups de voix, s’enthousiasmant sur les mouvements de ses gardiens.
« Un, deux, trois, quatre, cinq », les joueurs comptent les ballons devant leurs coéquipiers du centre cherchant à gratter la balle pour sortir de ce rôle ingrat. Plasil, lui, sort volontairement du jeu et s’écarte en posant à peine le pied droit au sol, se penchant en avant avant de s’asseoir. Milan Gajic, tout en continuant à participer au toro, appelle le staff pour prendre en charge le doyen de l’effectif girondin. Gustavo Poyet, sans ciller rétorque : « Non c’est bon, il n’y a rien, c’est Jaro. » L’entraîneur de Bordeaux voit juste et le milieu girondin regagne lentement son groupe - le plus excentré des trois - qui s’agite près d’un banc de touche dont la couleur blanche a subi les ravages du temps. Gustavo Poyet siffle énergiquement pour mettre fin au toro et tout le monde, par la force de l’habitude, se réunit au milieu de terrain, dos à une cage délimitant une aire de jeu dédiée à une opposition à venir. Après un rapide briefing, les joueurs se placent sur la largeur du terrain en deux lignes qui se font face, espacées d’une dizaine de mètres. Mauricio Taricco s’active et explique en Espagnol. Fernando se charge de la traduction et demande « la bonne passe » et de « jouer très court. » Dès que le ballon vit, ce sont deux grands carrés qui se forment grâce aux joueurs qui tournent à base de passes simples puis de contrôles orientés.
Au bout de quelques minutes de mise en jambes, un coup de sifflet incite à changer le sens de circulation. « Allez, un bon rythme » demande Fernando avec le ton pédagogue qui devient petit à petit sa marque de fabrique en tant que technicien. « Allez bon contrôle » insiste Mauricio Taricco, en Français dans le texte mais avec son accent espagnol accroché aux lèvres. Le jeu évolue et se fait en triangle. Le premier joueur fait un une-deux avec le partenaire le plus proche, puis effectue une diagonale courte. Le joueur en point d’appui remet en une touche au deuxième joueur du une-deux, lequel joue une diagonale plus longue à son tour avant de prendre sa nouvelle place. Le calme est revenu et seuls les bruits de crampons claquant les ballons dominent, éclipsant les cris d’éternels adolescents sortis des trois toros du début de séance. Le coup de sifflet sec est désormais légendaire de Poyet signe la fin de l’exercice. « Tout le monde ici » demande fermement l’entraîneur bordelais qui regroupe de nouveau les joueurs au centre du terrain. Les yeux rivés sur sa planche de notes, l’ancien entraîneurs du Betis Séville débite les prénoms des joueurs. Comme à son habitude, Mauricio Taricco distribue les chasubles et les joueurs vont se placer sur le demi-terrain, situé à l’opposé de l’entrée, pour une opposition libre. Mandanda garde la première cage, celle de l’équipe composée de Baysse, Lewczuk, Vada, Otavio, Cafu, Youssouf et Laborde. À l’opposé, Costil évolue avec Pablo, Poundjé, Sabaly, Koundé, Plasil, Lerager et Kamano.
Milan Gajic, lui, est resté sur le bord du terrain, près du banc de touche travaillé par les années et les saisons. Eric Bedouet lui donne quelques consignes. L’international serbe affiche un gabarit différent, bien plus épais qu’il y a quelques mois de cela. Alors que Gajic démarre un tour de terrain à allure soutenue, Gustavo Poyet travaille avec le groupe chargé de frapper au but pendant que l’opposition se déroule. L’entraîneur bordelais, légèrement intérieur côté gauche joue des une-deux avec Mauricio Taricco et Théo Pellenard chargés de centrer. Davy Rouyard et Gaëtan Poussin se partagent le poste de gardien de but. « Tu vas trop vite » informe Eric Bedouet à Milan Gajic qui déboule après son premier tour de terrain et insiste : « Milan, une seconde trop vite. » Du côté des frappeurs, deux joueurs sont chargés de fuser vers le but, prenant la direction d’un poteau chacun. Braithwaite, Malcom, Sankharé, De Préville, Verdon et Meïté sont dans le même groupe. De Préville place une volée qui sort au deuxième poteau et repose le pied difficilement, commençant à boiter à la sortie de son geste. L’ancien attaquant lillois revient difficilement se replacer dans le groupe de joueurs qui attendent à l’entrée de la surface. Younousse Sankharé marque d’une volée au deuxième poteau. Meïté lui marque du plat du pied au ras du deuxième poteau qui lui fait face. Le milieu prêté par Monaco pousse un « ouh » d’auto-satisfaction et mime un avion de ses bras. Pendant que tout le monde touche le ballon, Milan Gajic enchaîne les tours de terrain à un bon rythme, soufflant de plus en plus à chaque passage. Du côté de l’opposition, le travail libre donne lieu à des scènes qui seraient incongrues en match à l’image d’un centre de Baysse en position de débordement, intercepté par Costil, suite à une bonne passe cachée de Cafu à l’arrêt côté droit.
Gustavo Poyet siffle et intime l’ordre aux groupes de changer : « Va, là-bas, orange. » Les chasubles bleus s’arrêtent au niveau du charriot contenant les bouteilles d’eau pour récupérer avant d’attaquer l’opposition. « Tu vas vite, attention » corrige de nouveau Eric Bedouet qui cherche à freiner l’enthousiasme de Milan Gajic. Au loin, Jérôme Prior arrive, accompagné du kinésithérapeute David Das Neves. Le deuxième gardien girondin, en phase de retour après sa blessure au coude, met du temps à rentrer sur le terrain, presque timidement, comme s’il avait perdu l’habitude de la routine d’entraînement. Le match libre reprend et s’arrête assez rapidement. Un flot de contestations occupe l’espace. Les joueurs en chasubles bleues reprochent à Mandanda d’avoir sorti le ballon et réclament de le récupérer. « Over ? » Gustavo Poyet interroge son gardien. « Non je ne l’ai pas touché » rétorque le jeune frère de Steve Mandanda avec une pointe de malice dans la voix, lui-même à moitié convaincu. Du côté de l’atelier frappes au but, Valentin Vada frappe largement au dessus et s’invective. Les centres viennent du côté droit où Paulo Grilo, l’entraîneur des gardiens, et l’inusable Mauricio Taricco effectuent des une-deux pour un centre du dernier nommé. Valentin Vada reprend un nouveau ballon qu’il dévisse complètement. Le jeune argentin trépigne lui aussi après la frappe, à l’instar de De Préville auparavant. « Attaque » conseille sobrement Mauricio Taricco.
L’opposition s’anime quelque peu. « Dégage Over » demande un joueur. Mandanda effectue une feinte de dégagement avant de lancer Pellenard d’une passe ciselée rasant le sol. Le centre du latéral gauche termine sur la tête de Sankharé qui marque au deuxième poteau. « Bien joué Over » félicite un Gustavo Poyet présent au bord du jeu et satisfait par la relance intelligente de son gardien. Sur l’action suivante, Malcom est serré par le pressing adverse. Malgré les propositions récurrentes de Mandanda pour lui servir de point d’appui, le meneur de jeu brésilien des Girondins s’entête et finit par sortir du marquage en relançant dans l’axe, déterminé. Quatre passes plus tard, Malcom se retrouve à la finition du mouvement qu’il avait initié. Le jeu n’est pas enlevé, mais quelques actions tentent de faire décoller les choses. Une tête à bout portant de Kamano est sortie sur la ligne par Mandanda. Le ballon revient sur Pablo qui marque. « Y’a main » crient à l’unisson les joueurs bleus. Après quelques phases de jeu, l’opposition prend fin. Les joueurs errent à différents endroits de la pelouse. Remonté, Jaroslav Plasil s’entretient avec Gustavo Poyet, revenant sur un hors-jeu : « Faut arrêter, il est trois mètres derrière. » L’international tchèque, bougon, ne décolère pas et part se placer au niveau d’un groupe de ballons pour se préparer à centrer.
Milan Gajic, mains sur les hanches récupère et s’arrose le crâne au milieu du terrain. Le jeu redémarre sur une nouvelle opposition. Gustavo Poyet, plusieurs mètres plus loin, les bras croisés, esquisse un léger rire devant l’enthousiasme mis par ses joueurs. Nicolas De Préville reste au sol quelques instants après un contact mais parvient à se relever. Valentin Vada laissé trop tranquille au milieu de Verdon, Pellenard et Meïté, marque d’un tir croisé qui bat Costil. Younousse Sankharé rend la pareille à l’équipe de Valentin Vada en interceptant une tentative de contre et en dribblant Mandanda pour marquer dans le but vide. Les joueurs chargés de frapper ont le dos tourné à la cage et observent leurs coéquipiers s’affronter, dans le plus grand des calmes. Les ballons sont enfin regroupés sur la droite et les attaques peuvent redémarrer avec Gajic et Sabaly au une-deux pour des centres du dernier nommé. Deux centres de Sabaly, trop forts prennent de court Kamano et Pablo qui doivent s’emparer des ballons de la main. François Kamano, à deux mètres du but, croise sa tête mais cette dernière part à côté. La musique lancinante du coup de sifflet de Gustavo Poyet redémarre après plusieurs minutes d’attaques à rythme très modeste. L’entraîneur girondin se plonge dans ses notes. À quelques pas de lui, les joueurs en chasubles bleues et oranges attendent, mélangés, mains sur le hanches. « Oh, prenez les ballons, venez ici » demande Gustavo Poyet devant l’attentisme de ses joueurs. Le temps de latence est long avant de repartir sur une ultime opposition, et un nouveau cycle de frappes aux buts. Légèrement placé dans l’axe, décalé à gauche, Fernando sert de point d’appuis aux joueurs censés travailler leurs frappes. Les tours s’enchaînent. Malcom tente l’une de ses spécialités, le ballon enroulé, mais sans réussite. Laborde place un extérieur du pied droit audacieux qui frôle l’équerre. L’exercice s’est décalé vers l’intérieur, est c’est Eric Bedouet qui sert désormais de point d’appui. Laborde et Malcom touchent tous les deux les poteaux.
Sur l’opposition, Igor Lewczuk intervient de manière musclée, par derrière, sur un Valentin Vada qui crie de douleur et s’effondre. Gustavo Poyet en profite pour intervenir et donner une leçon tactique à ses joueurs. Pendant trois bonnes minutes, l’entraîneur explique, sous le regard de joueurs qui semblent parfois ailleurs. Valentin Vada, lui, se remet tout seul de son choc. Igor Lewczuk, à quelques mètres, mains sur les hanches, a déjà oublié cet épisode et s’est tourné vers l’entraîneur. Fernando est de nouveau passé en point d’appui dans l’axe. Les remises sont variées et font travailler les frappes du pied droit puis pied gauche. De Préville marque deux fois et envoie des frappes croisées aux allures de sacs de ciment. Gaëtan Laborde qui a gardé sa chasuble orange, croise trop son tir et baisse la tête en partant se replacer. Fernando, en short et manches de survêtement relevées, s’est décalé vers le côté droit en regardant les cages et remet les ballons intérieur pour des frappes pied gauche. L’intensité n’est pas au rendez-vous.
Gustavo Poyet siffle pour la septième fois de l’entraînement, au minimum. Certains joueurs s’abreuvent au milieu de terrain tandis que Paulo Grilo, Plasil, Mandanda et Otavio s’attèlent à déplacer la cage amovible du milieu de terrain vers l’extérieur en la faisant basculer par dessus la main-courante. Quelques joueurs quittent le terrain. Dans le dos des supporters, l’agent Christophe Hutteau, escorté de plusieurs journalistes, déambule et se dirige vers l’entrée du terrain. À quelques mètres des joueurs restants, Gustavo Poyet, Plasil et Fernando ont une discussion animée en Espagnol. Pendant que l’intendant chargé de regrouper les ballons lors des entraînements se dirige vers la sortie, les bras remplis de chasubles, Mauricio Taricco continue d’envoyer des centres depuis le côté droit. Jules Koundé tente une reprise du gauche qui vient heurter sa cheville droite, chambré immédiatement par Gaëtan Poussin. Pendant que ses coéquipiers enchaînent les frappes, Otavio est allongé au milieu du terrain sous le regard d’Eric Bedouet à quelques mètres de lui. D’un coup, le Brésilien se relève et place une brève accélération, puis se replace au même endroit, en position allongée. Eric Bedouet vient se mettre dans la même position et montre la bonne manière de se relever. Après un nouveau cycle, Otavio revient et se positionne sur le ventre et réédite le schéma. Eric Bedouet lui tape dans la main à la fin de cette brève séance physique. Au loin, la chevelure de Paul Baysse flotte au gré de ses foulées. Le défenseur girondin, solitaire, s’adonne à un footing le long du terrain avant de disparaître en passant par le parking des supporters.
Au fur et à mesure, les joueurs restés pour frapper quittent le terrain. Koundé et De Préville restent. Poussin se détend et sort un tir croisé de De Préville. Deux frappes plus tard, Poussin ne peut que dévier le même type de frappe de son coéquipier dans les buts. « Ah non » se désole Jules Koundé devant la réussite de son partenaire qui vient clore la séance et lui donner la victoire dans ce duel de fin d’exercice. La séance s’achève et le terrain retrouve sa quiétude, comme si rien ne s’était passé. La camionnette de location servant à amener le matériel d’entraînement remonte la légère pente le long du terrain encaissé pour effectuer le court trajet séparant l’espace de jeu du jour du complexe des professionnels. Jules Koundé s’arrête auprès d’une famille pour signer des autographes et prendre des photos. Un parfum de fin d’exercice flotte au Haillan. Il reste quatre matchs aux Girondins pour effectivement en finir avec cette étrange saison. Mais cela commence par Dijon samedi soir.
Par Florian RODRIGUEZ au Haillan