Carnet d’entraînement : Entre routine et transition
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Mardi 1er mars 2016 - 16h15 : Pour leur deuxième entraînement du jour, les Girondins ont effectué une séance studieuse sous une grisaille peu avenante. Sous la houlette d’un staff toujours impliqué, les joueurs ont effectué des travaux bien rodés et travaillé la transition attaque-défense.
Un temps gris, entre humidité et fraîcheur, un groupe tantôt joyeux, tantôt maussade. L’entraînement de l’après-midi est à l’image de la saison des Girondins. Quelques regains de motivation, une envie évidente de bien faire, mais un manque de soleil dans les attitudes des joueurs. À l’instar de la grisaille qui a le plus souvent accompagné les séances girondines que les passages ensoleillés cette saison. Le sérieux et l’application sont pourtant là. À l’image de la confrérie des gardiens, déjà en présence sur le terrain à 16H15. Paul Bernardoni, Alexandre Brucato et Lucas Bobe allongent les passes sous la houlette de Franck Mantaux. Les techniques sont variées et très vite l’entraîneur des gardiens donne ses premiers conseils à Bernardoni : « Voilà, laisse le ballon rebondir devant toi avant de le contrôler ». Le jeu au pied est un élément sur lequel insiste souvent Franck Mantaux lors de ses séances. Quelques habitués ont bravé le temps venteux et froid pour assister à la séance de l’après-midi et voir les joueurs investir rapidement le terrain d’entraînement. Déjà équipés de chasubles bleus, oranges et blancs, les joueurs débutent leur échauffement avec des contrôles-passes classiques avant de former des trios. Face à face, les footballeurs se font des passes en une touche de balle et prennent la place du partenaire en courant afin de dynamiser l’échange. Pierrot Labat, en survêtement, suit un petit groupe de jeunes joueurs et adresse ses salutations aux supporters, suivi de son petit chien, héritier du grand berger allemand qui le suivait sur le terrain d’entraînement lorsqu’il était l’adjoint d’Elie Baup. Une autre époque. Frédéric Guilbert, chaussé de tennis, croise la route de Pierre Labat en effectuant un footing en solo, et s’arrête pour lui faire la bise. Preuve que le mentor des jeunes girondins a encore une influence même après un passage dans le milieu professionnel. Sur le terrain, pendant que les joueurs poursuivent leur échauffement, Mathieu Debuchy, Robin Maulun et Grégory Sertic effectuent des tours de terrain devant l’oeil de la caméra de Girondins TV. Grégory Sertic est sur le bon chemin et court avec le ballon au pied. Patrick Guillou s’adresse à Pablo dans un mélange d’Espagnol et de Portugais, et les joueurs terminent la phase préliminaire d’entraînement en plaçant des accélérations en ligne de deux. De face tout d’abord, puis en effectuant quelques pas en arrière et en se retournant avec vivacité.
Debuchy, Maulun et Sertic touchent le ballon
« Les blancs au milieu ». On entend la grosse voix de Sylvain Matrisciano décréter le début de l’entraînement. Dans cet exercice déjà vu les semaines passées, sorte de toro géant, l’équipe du milieu doit exercer un pressing sur les autres joueurs et essayer de récupérer rapidement le ballon. Les coachs, Patrick Guillou en tête, s’évertuent à compter le nombre de ballons touchés avant l’interception. Dès que le ballon est perdu, l’adjoint de Willy Sagnol indique quelle équipe se retrouve au centre du terrain. Cet après-midi, les blancs sont Clément Chantôme, Diego Contento, Thomas Touré, Isaac Kiese-Thelin, Cédric Yambéré et Mauro Arambarri. Les oranges sont composés de Pablo, Adam Ounas, Abdou Traoré, Maxime Poundjé, Enzo Crivelli et Diego Rolan. Quant aux bleus, ils sont formés par Jussiê, Milan Gajic, Lamine Sané, Malcom, André Poko, et Valentin Vada. Les Sud-Américains Vada et Malcom, respectivement équipés d’un bonnet et d’un col roulé, sont les moins réchauffés du groupe présent pour l’entraînement. Le ballon vit dès le début de l’exercice. Les joueurs ne trichent pas dans des conditions compliquées pour faire du sport en extérieur, malgré leur statut de professionnels de football. « Il y a main » crie Guillou sur une action litigieuse. « Ça joue » rétorque Matrisciano. « Parlez-vous » demande Sylvain Matrisciano à ses joueurs tandis que Patrick Guillou encourage Thelin par un « bien joué Isaac » valorisant pour un attaquant qu’il ne lâche pas depuis des semaines. Willy Sagnol, en retrait, observe et laisse ses adjoints gérer ce moment de l’entraînement. Un peu plus loin, proches de la salle de musculation, Debuchy, Sertic et Maulun travaillent ensemble. Grégory Sertic passe le ballon à Mathieu Debuchy qui tape contre un petit mur, trouve Robin Maulun sur sa droite, lequel remet à son partenaire. Au fur et à mesure, le joueur central change. À quelques mètres d’eux, le ballon continue de tourner et Contento prend un mauvais coup avant de se relever. Les groupes de joueurs au centre changent régulièrement. L’ambiance est froide à l’instar des rafales de vent qui soufflent sur la plaine des sports. Si Lamine Sané replace parfois ses partenaires, peu de joueurs s’expriment ou témoignent d’une grande complicité.
« Vite, vite, vers l’avant, transition »
La dernière partie de la séance va être celle de Willy Sagnol. Dans le cadre d’une opposition sur un quart de terrain, les différents chasubles s’affrontent. C’est souvent l’occasion pour le coach bordelais d’ajuster les attitudes et positions de ses joueurs. Le thème de ce dernier galop d’entraînement est la transition entre l’attaque et la défense. Malcom, pour les bleus, ajuste rapidement Lucas Bobe d’un plat du pied gauche légèrement relevé. « À droite, à droite, allez ». Paul Bernardoni se montre autoritaire. Si on sent l’ancien gardien troyen encore un peu hésitant dans sa communication, les progrès sont évidents depuis ses premiers entraînements. Pablo, pour les oranges, se retrouve en position de débordement avec une belle puissance et centre pour Traoré qui ne trouve pas le cadre. Dans une opposition où l’équipe qui encaisse un but laisse sa place à l’équipe réserviste, chaque joueur a le temps de se montrer. Jussiê trouve André Poko en profondeur qui fait preuve d’efficacité en marquant le but du plat du pied droit. « Ouais » crie Lamine Sané, rageur. Willy Sagnol derrière les buts commence à s’exprimer, devant une action accrocheuse de Traoré : « Tu ne lâches pas, tu ne lâches pas Abdou ». « Milan gauche, Poko droite, ça rentre Juss », Paul Bernrdoni continue de diriger ses hommes avec volonté. Cela n’empêche pas le jeune gardien bordelais d’encaisser une superbe frappe enroulée d’Enzo Crivelli sans bouger. « Allez, chacun son joueur » râle Willy Sagnol, insistant sur la rigueur dans le comportement. Lors d’une pause hydratation, Sagnol s’adresse à Rolan et Arambarri et mime le bon positionnement avec des gestes. De l’autre côté du terrain, Grégory Sertic allonge ses passes avec Debuchy et Maulun, à l’aise, fluide, sans gêne apparente. « Les blancs, on sort dessus. Oui c’est bien Mauro. Vite, vite, vers l’avant, transition ». Willy Sagnol monte le ton, rageur. Mauro Arambarri perd un ballon et se bat pour le récupérer. Une attitude qui plaît à son entraîneur. Touré fait avancer le jeu, et remporte lui aussi l’adhésion de son coach : « Oui Thomas, c’est simple mais c’est efficace ».
Joyeux comme des juniors
Tandis que Diego Rolan s’emmêle les pinceaux, Enzo Crivelli tente de placer une grosse frappe qui finit sur la cuisse de Yambéré. Ce dernier ressent le coup de fouet du ballon froid et met du temps à s’en remettre. Les bleus sont en forme et Vada multiplie les buts. Gajic trouve lui aussi le dessous de la barre transversale. Poko y va aussi de sa réalisation. « Bien joué André » exprime Willy Sagnol, couvert par les cris de joie de ses joueurs. L’ambiance monte, tout du moins chez les bleus qui sont les meilleurs sur le terrain. Touré, un peu agacé, tacle Valentin Vada qui reste au sol. Dépité, le jeune attaquant bordelais s’adresse à Patrick Guillou qui semble aller dans le sens d’une faute : « t’es sérieux toi ? ». Sans un geste pour son coéquipier, Touré se replace et Vada se relève. Le jeune argentin et Bordelais trouve une nouvelle fois la lucarne sur l’action suivante. Pablo, chez les oranges, est impressionnant physiquement et s’impose au milieu de plusieurs joueurs. Les bleus sont en verve, les oranges plutôt dans le match, en revanche les blancs de Chantôme, Touré ou Contento ne sont pas à la fête. « Les blancs, on va faire un entraînement supplémentaire ce soir » dit Sagnol sur un ton ironique mais tout de même assez sérieux. Abdou Traoré, bien dans sa séance, place une lourde frappe, une « mine » dans le jargon, qui vient trouver la lucarne. « Les bleus vous vous êtes vus trop beaux » prévient Sagnol. Dès qu’un ballon est perdu, les joueurs doivent se replacer très rapidement. Dès qu’il est récupéré, ils sont incités à vite jouer vers l’avant. « Transition » hurle Willy Sagnol à plusieurs reprises pour pousser ses joueurs à ne pas se relâcher une fois le ballon perdu. Ounas prend un coup et reste au sol lui aussi, se touchant derrière la jambe à un endroit bardé d’élastiques auto-collants. Les oppositions sont vivantes, accrochées. Lamine Sané allume Pablo sur une frappe. Le ballon claque fort. Le Brésilien qui avait tendu la jambe se retrouve à terre et se relève, sans broncher. Bien des joueurs seraient restés au sol après cette frappe soudaine prise pleine cuisse. Mais pas Pablo qui dégage une réelle impression de force depuis son retour à l’entraînement. La séance touche à sa fin. Les bleus enchaînent et portent l’estocade sous l’impulsion d’un super Valentin Vada. Trois coups de sifflets retentissent. C’est fini. Les bleus crient de joie et courent dans tous les sens. Ils sont les derniers buteurs et remportent donc la partie après avoir dominé la séance. Cela faisait longtemps que les joueurs n’avaient pas été aussi joyeux. Lamine Sané est heureux comme un junior. Très vite, Sané, Vada, Poko, Jussiê, Gajic et Malcom, rejoints par leur gardien Bernardoni, forment un cercle et se mettent à chanter sur un air de victoire et à sautiller. L’image est belle. Avec des moments de plénitude et beaucoup de passages à vide, cette équipe bordelaise est paradoxale. En parlant de transition, on croise Jaroslav Plasil, en survêtement, près des vestiaires des équipes réserves. Loin de chômer, l’international tchèque, avec un air extrêmement modeste, est en compagnie d’éducateurs d’enfants en bas âge qui arrivent avec leurs sacs à dos et saluent le joueur professionnel en même temps que leurs formateurs. Présent sans doute dans le cadre de son cursus d’entraîneur, Plasil, souriant, semble plein d’humilité. Humilité et enthousiasme : ce seront les ingrédients nécessaires pour les coéquipiers de « Jaro » pour faire la transition entre une énième désillusion à Reims et 10 derniers matchs pour relever la tête.
Par Florian RODRIGUEZ au Haillan