Entretien - Margot Dumont : "David Guion intériorise énormément"

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WebGirondins : Margot, qu'a-t-il manqué à Bordeaux pour accrocher la Ligue 1 la saison dernière ?

Pour moi, le tournant, c'était le match à Annecy (NDLR Perdu 1-0). C'est difficile de dire ce qu'il a manqué. En tant qu'ancienne joueuse, par expérience, je sais qu'on n'a pas la même analyse quand on est sur le terrain. Et quand on observe, c'est compliqué de mettre un jugement sur ce qu'il a manqué. Après, la Ligue 2, c'est un championnat compliqué. Tout le monde peut battre tout le monde. Pour en avoir parlé avec les joueurs, je dirais que l'expérience est cruciale. Peut-être qu'il a manqué un peu d'expérience chez certains, il a manqué de cadres.

Il aurait fallu plusieurs Yoann Barbet pour ce genre de match. Et là, ils se sont renforcés avec des joueurs qui ont plus d'expérience en Ligue 2. Je pense à Livolant et Weissbeck. Je ne te parle pas de leur qualité de joueur intrinsèque. Je te parle de l'expérience qu'ils peuvent avoir pour le championnat de Ligue 2. Je pense que c’est surtout ça qu’il a manqué aux Girondins,

La Ligue 2 est-elle différente cette saison comparativement à la précédente ?

La différence la plus importante, c'est le retour des barrages. Ça change quand même beaucoup de choses dans l'approche de la saison. Parce que tu as un “Joker” qui peut te permettre malgré tout de terminer 3e, 4e ou 5e. Ce n'était pas le cas sur la saison précédente. Donc c'est assez important. Et ensuite, sur le niveau global, je ne vois pas forcément de grande différence. Chaque année, pour moi, la Ligue 2, depuis 3 ou 4 ans, 5 ans , c'est pour moi une Ligue 1 bis pour ce qui est du haut de tableau.
Si tu prends le haut de tableau et les 7 dernières équipes de Ligue 1, il y a match.

Que retiens-tu des 5 premières journées de Ligue 2 ?

Ce que je retiens, c'est le Stade Malherbe Caen qui sur les dernières saisons avait un peu de mal à se mêler à la course au titre, aujourd'hui ils sont en leaders. Ils ont changé de coach, de staff, et ils n'ont pas énormément recruté. Pour moi, c'est l'un des favoris cette saison, car ils ont gardé une ossature. Ce que je retiens aussi, c'est Laval, l’une des surprises qui est 3e du championnat. Ils proposent du spectacle et gagnent tous leurs matchs à domicile. C'est toujours compliqué d'aller gagner du côté de Laval. Le stade est tout le temps plein.

D'un point de vue plus négatif, il y a Saint-Étienne qu’on attend plus haut et qui avait réalisé une belle fin de saison. Là, ils sont 15e. Puis, le Paris FC, je ne m'attendais pas à ça. Même si j'ai changé de coach, ils sont 18e, pas évident. À Bordeaux, je m'attendais aussi à ce que ça démarre un peu plus vite.

Justement, quel est ton regard sur les Girondins, sont-ils taillés pour la montée en Ligue 1 ?

Bordeaux, pour moi, ils font partie des favoris. Ce n’est pas parce qu'ils ont perdu deux matchs et fait un match nul qu’on ne peut pas considérer qu'ils soient des favoris. Après, il faut que ça se mette en route une bonne fois pour toutes. On pensait que c'était bon après Amiens. Il y a eu une rechute contre Auxerre. J’ose espérer qu'avec l'effectif qu'ils ont, avec l'engouement qu'il y a autour du club, que ça donne quelque chose cette saison. En tout cas, s'ils n’arrivent pas à accrocher les cinq premières places, ça me semblerait catastrophique par rapport aux qualités de cette équipe. Ils vont clairement se mêler à la lutte pour la montée.

 

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"Il y a aussi des joueurs sur le terrain. Je m'attendais à ce qu'ils montrent un peu plus. Qu'ils mouillent un peu plus le maillot, et voir plus de révolte"

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Certains disent, des observateurs aguerris, des coachs, que les Girondins ont grillé un joker sur ce début de saison avec les deux défaites, qu’en penses-tu ?

Je suis d'accord, notamment sur le match d’Auxerre. Pour moi, c'est un premier tournant psychologique. Ce n'est pas forcément comptable, mais psychologique, oui. Cela peut avoir des conséquences sur les deux trois prochains mois, car les écarts vont commencer à se faire. C'est vrai que Bordeaux-Auxerre, à domicile face à un concurrent direct, c’est un révélateur quelque part. J’entends les supporters qui crient “Guion démission”. En attendant, il y a aussi des joueurs sur le terrain. Je m'attendais à ce qu'ils montrent un peu plus. Qu'ils mouillent un peu plus le maillot, et voir plus de révolte. À un moment c'était une défense gruyère, les auxerrois, ils passaient trop facilement. On va voir comment ils vont réagir. Ça va être là le plus important, la réaction. Tu enchaînes trois déplacements. Donc, pour moi, les trois prochaines semaines vont clairement nous indiquer l'état de forme de cette équipe.

Comment trouves-tu l’attitude de David Guion que tu côtoies les soirs de match avec beIN SPORTS ?

David, il est assez étonnant. Qu'il gagne ou qu’il perde, je n'arrive jamais à déceler dans son regard, dans son attitude, un sentiment. C'est-à-dire que j'ai l'impression qu'il n'extériorise pas. Il intériorise énormément. Donc, ce n'est pas quelqu'un qui montre beaucoup ce qu'il pense ou ce qu'il ressent. Il arrive très bien à communiquer, il est très fort pour faire des phrases qui vont se perdre un petit peu. Il est assez fort pour développer autour d'une question qu’on va lui poser, qui va pourtant être incisive. Mais lui, il va réussir à changer un petit peu le sujet ou pas forcément répondre vraiment à ta question. Pour moi, c'est quelqu'un qui extériorise peu. Je ne sais pas comment il est dans le vestiaire. Les joueurs, en plus, quand tu leur poses la question ils te disent que tout va bien, et  ils ne vont pas te dire l'inverse. Mais comme ça, en interview, il est assez étonnant.

 

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"Les 3 prochaines semaines seront cruciales pour David Guion"

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Crois-tu qu'il puisse aller au bout de cette saison sur le banc bordelais ?

Oui, bien sûr, j’y crois. Parce que pour le moment, on est à la cinquième journée et on n'a pas passé les trois prochaines semaines. Je te ferai peut-être une autre réponse dans trois semaines. Pour le moment, il n'y a pas forcément de raison de changer d'entraîneur. Je suis plutôt partisane du fait de ne pas changer de coach au bout de cinq journées. Maintenant, attention quand même aux trois prochaines semaines. Ça va être vraiment un moment crucial. Pour moi, la question ne se pose pas à la J5, mais elle va se poser entre la J5 et la J8.

Tu as été joueuse de football. D’un point de vue global, que penses-tu de l'évolution du football féminin en France comparativement à ce qui se passe dans d'autres pays européens ?

Pour moi, on est très en retard au niveau de la mentalité, des infrastructures, des médias, de la diffusion, des moyens. On est très en retard par rapport à plusieurs pays voisins : l'Allemagne, l'Asie, la Norvège, même l'Espagne. Même l'Italie remplit certains stades sur des matchs de la Juve. Il y a le sentiment qu'on part de loin, alors qu'on était un moment en avance sur ces pays.

Grâce à Jean-Michel Aulas, il y a eu une énorme avancée à un moment donné. C’est très compliqué de changer les mentalités en France. Ça part aussi du système scolaire, où on considère un peu le sport comme un boulet. On part de très très loin. Si on explique aux enfants que le sport, ce n'est pas sérieux, c'est un peu la récréation... Ce n'est pas comme ça que je vois les choses. En plus, je vais beaucoup aux États-Unis. Là-bas, le sport fait partie intégrante de ton parcours scolaire, de ton établissement et de ton accomplissement en tant que citoyen. C'est tout un système à revoir, je pense. Il faut faire reprendre conscience aux gens que le sport et le foot, et le football féminin, c'est quelque chose de sérieux, que ce sont des athlètes qu'il faut respecter.

Il y a quand même aussi beaucoup de misogynie et beaucoup de machisme ambiant. Je le ressens aussi en tant que femme dans le foot. Heureusement, il y a quand même beaucoup de personnes bienveillantes. Les joueuses ont beaucoup de mérite, de s'imposer, de persévérer dans le climat ambiant. Je pense qu'il manque encore un trophée international à l'équipe de France pour peut-être s'établir encore un peu plus et être encore plus légitime dans l'état d'esprit du grand public. Je trouve ça très dommage en tout cas, parce qu'elles sont de formidables athlètes.

Quel est ton regard sur le projet féminin aux Girondins de Bordeaux ?

Je m'étais entraînée avec elle, j'avais fait une prépa physique avec elle il y a 5 ans à peu près. J'avais trouvé le niveau hyper intéressant, l'environnement professionnel super compétitif, ça m'avait vraiment marquée. Elles avaient toutes les conditions d’entraînement comme les garçons. Je ne voyais pas de différence. Je ne sais pas comment c'est aujourd'hui. Après, il y a eu pas mal de changements ces dernières années. La saison dernière c'était un peu plus difficile. Pour moi, c'est une équipe qui devrait faire partie tous les ans du top 3 du top 5 de la D1 Arkema.

Parlons de la couverture beIN SPORTS de la Ligue 2. Tu fais des interviews sur le terrain pendant l’échauffement, tu n’as pas peur de recevoir un ballon ?

C'est sûr que j'y vais en mode : "je fonce sur le terrain". C'est vrai qu'ils sont en train de faire des transversales, des passes, etc. Je fais évidemment très attention, je regarde bien où je marche. Je ne veux pas gêner l'échauffement. L'idée, c'est vraiment de se faire petit comme une petite souris.

Mais oui, c'est vraiment mon truc. Des fois, les joueurs me regardent et sont un peu surpris que j'apparaisse là au milieu de l'échauffement. Cette semaine, il y a eu Bordeaux-Auxerre, je voyais Gaëtan Perrin qui faisaient des frappes au but avec sur des accélérations. D'un coup, il me voit, il fait de gros yeux. Je lui ai dit " t'inquiètes, je ne suis pas là." C'est assez rare de pouvoir faire ce genre de choses. Ce serait compliqué de le faire en Ligue 1.

@MargotDumont

Est-ce que tous les clubs acceptent ?

Dans la plupart des cas, les clubs jouent le jeu sauf les grosses écuries habituées de la Ligue 1. On le fait dans le respect du groupe.

Le plus chambreur les jours de matchs c’est Clément Grèzes Robert Malm ou toi ?

Robert sans aucun problème, c’est un nounours qui te réconforte, te donne le sourire, il est là pour te soutenir. C’est une super personne. Clément est très sérieux dans le travail et c’est une personne avec qui tu apprends beaucoup. Pour moi, il devrait être un "commentateur star" en France. Il y a un très bon équilibre entre nous.

Est-ce que tu souhaites ajouter un dernier mot ?

Je souhaite une bonne saison aux supporters des Girondins qui sont adorables avec moi. L'accueil est très bon au matmut. Je les apprécie et je les remercie pour leur soutien.

N.P