Entretien. Marius Trésor : "C’était extraordinaire, j’ai même versé une larme"

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Le stade Valette de Saint-Anne en Guadeloupe se nomme désormais le stade Marius Trésor. L’ancien défenseur des Girondins et de l’équipe de France s’est confié à WebGirondins sur ce moment marquant avec son oeil sur les Girondins de Bordeaux.
WebGirondins : comment s’est faite la démarche d’inauguration du stade en votre nom ?
Marius Trésor : c’est la troisième municipalité qui me le propose, les deux premières, j'avais dit non. Et la dernière, j’ai des amis qui vivent à Saint-Anne, qui m’ont dit que ce serait une très bonne chose que le stade porte mon nom. Et la municipalité actuelle voulait à tout prix que ça se réalise. Et ça s’est fait l’année dernière.
Pourquoi avoir refusé les deux premières fois ?
Dans ma tête, donner son nom à un stade, ça se fait la plupart du temps quand la personne n’y est plus. Donc, je me disais, j’ai encore envie de vivre (rires). Mais Yannick Stopyra a eu un stade à son nom et il m’a dit que ça avait été une belle fête, donc j’ai dit oui.
Quel était le sentiment sur place ?
Ce fut extraordinaire, vraiment magnifique. Pour la seule et unique raison que les gens ont, tout fait pour nous mettre à l’aise à notre arrivée. Pour le jour de mon anniversaire, tout était organisé, c’était vraiment géant.
L’accueil des gens devait être spécial ?
Franchement, je ne pensais pas, car ça fait un bon moment que j’ai quitté le milieu du foot actif. J’ai arrêté ma carrière en 1984 et, quand j’étais là-bas, j’étais dans une école où les enfants étaient âgés maximum de 10-12 ans.
Et quand je les voyais poser des questions sur ma carrière, sur la coupe du monde 1982, c’était extraordinaire. J’ai même versé une larme parce que ce sont des enfants qui ne m’ont pas vu jouer et ils me posaient plein de questions, c’était vraiment magique.
“Le premier match que je fais en tant qu’attaquant, c’était Juventa-Juventus aux abîmes. On gagne 3-0 et c’est moi qui mets les 3 buts”
Quel est votre meilleur souvenir là-bas ?
Mon meilleur souvenir, je dirais que c’est le titre de champion de la Guadeloupe que j’ai décroché avec la Juventus Saint-Anne lors de la saison 1968-1969. Et je suis partie après en septembre 1969 (à Ajaccio).
Vous avez joué attaquant également à une période ?
J’ai débuté en tant que défenseur et au cours de la saison, on a eu des attaquants qui sont partis jouer en Martinique et mon entraineur de l’époque m’a dit, “On a suffisamment de défenseurs, je vais te faire jouer devant.” J’étais un peu touche-à-tout, sauf gardien de but (rires), mais je pouvais me débrouiller à n’importe quelle place. Et le premier match que je fais en tant qu’attaquant, c’était Juventa-Juventus aux abîmes. On gagne 3-0 et c’est moi qui mets les 3 buts. Et en ne faisant qu’une moitié de championnat en tant qu’attaquant, je termine parmi les meilleurs buteurs du championnat.
Pourquoi ne voit-on pas plus de joueurs issus des îles dans des clubs de la métropole ?
Maintenant, c’est encore difficile, moi, je suis partie, j’avais 19 ans. Aujourd’hui, un garçon de 19 ans pour se faire une place dans un club de la métropole, c’est difficile. Les éducateurs considèrent que c’est déjà trop tard. Je suis partie à 19 ans et ça ne m’a pas empêché de faire une carrière, mais ça ne se passe pas comme ça maintenant.
Bien sûr que le niveau est plus faible, mais ce n’est pas une raison pour se dire qu’il n’y a pas de bon footballeur que ce soit en Martinique, en Guadeloupe, en Guyane ou à la Réunion. Mais malheureusement pour les recruteurs, venir à 19 ou 20 ans, c’est trop tard.
Et les parents ne vont peut-être pas laisser partir leur gamin à 12 ou 13 ans pour venir en Métropole. Des garçons comme Thierry Henry, comme Lilian Thuram, ont grandi en métropole, par exemple.
“Quand on aime ce club, on a simplement envie qu’il retrouve le haut niveau”
Vous suivez toujours les Girondins ?
Je regarde toujours oui, je suis sur TV7 les matchs. Et puis ça devient de plus en plus intéressant maintenant.
Quand on a connu les grandes heures de ce club, est-ce que c’est difficile de suivre parfois ?
Quand on aime ce club, on a simplement envie qu’il retrouve le haut niveau. On sait que ce sera long et compliqué. Quand on voit le début de saison, pas grand monde ne pensait qu’il reviendrait à un point de la première place. Maintenant qu’ils sont bien dans ce championnat, il faut essayer de ne pas y rester trop longtemps. Et s’il y a monté à la fin, peut-être que ça intéressera 2-3 personnes pour donner un nouvel élan à ce club.
Il y a des joueurs qui sont restés, comme Jean Grillot par exemple.
Oui, il y a aussi celui que j’ai connu, c’est Cédric Yambéré, Malhory Noc ou encore Emeric Depussay, ces garçons qui sont revenus ou restés au club, je leur dis bravo, parce qu’ils ont été formés aux Girondins et ils ont envie que le club retrouve un rang plus juste, je leur dis bravo.
Le centre de formation a fermé ses portes cet été. Est-ce que la formation bordelaise pourra se relever ?
C’est tout ce qu’on souhaite si on arrive à retrouver des repreneurs qui aiment ce club et qui ont envie que Bordeaux retrouve un statut, ça passera de toute façon par un centre de formation performant comme ça a été le cas. Le président actuel a voulu tout arrêter et on espère que Bordeaux retrouvera son centre de formation prochainement.
Nathan Hanini
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