Carnet d’entraînement : De la cohésion

08/02 - 16:25 | Il y a 8 ans
Carnet d’entraînement : De la cohésion

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Jeudi 8 février 2018 - Le Haillan : Sous un froid saisissant, les Girondins ont préparé la réception d’Amiens en se divisant en trois groupes après avoir effectué un grand toro où les rires et les gestes de bonne humeur ont été légion.

Les parties herbeuses qui recouvrent la terre à moitié dénudée entre les terrains du domaine du Haillan sont enfin sèches. Après des mois de pluies, les petits trous laissés par les crampons des jeunes qui vont et viennent entre leurs vestiaires et les terrains d’entraînement sont visibles dans le sol. Les intempéries n’ont pas été profitables au terrain des professionnels, beau d’aspect extérieur, mais bichonné régulièrement par les jardiniers et délaissé jeudi par Gustavo Poyet et ses troupes. Comme lors de sa première avant-veille de match, le technicien uruguayen a choisi d’occuper l’ancienne pelouse de la CFA de l’époque. Le portail du terrain des professionnel est ouvert, et une diagonale d’une vingtaine de mètres est à parcourir pour accéder à l’espace de jeu du jour. Pierre Espanol, le dos chargé d’un sac de ballons volumineux, s’arrête au niveau du terrain parallèle au terrain principal et salue Mathieu Chalmé qui était en train de superviser la séance de ses joueurs de la Nationale 3. Après avoir devisé quelques instants avec le coach de la réserve avec qui il avait assuré l’opération fin de saison aux côtés d’Ulrich Ramé il y a deux ans suite au départ de Willy Sagnol, l’entraîneur adjoint des Girondins pénètre sur la pelouse consacrée aux professionnels. Deux filets de tennis-ballon sont tendus, éloignés d’une vingtaine de mètres et séparés par le rond central. Du côté de l’entrée du terrain, une cage encore retournée s’apprête à accueillir les gardiens, et face à eux, se dresseront quatre mannequins disséminés sur la largeur du terrain, quelques piquets entre eux et une autre série de mannequins en retrait.

À mesure que les joueurs pénètrent sur le terrain, les spectateurs se rapprochent et peuvent s’accouder à la main-courante. Les supporters girondins jouissent d’une vue parfaite et d’une proximité sans égal avec les joueurs, l’un des périmètres du tennis-ballon marqué par des plots se situant à deux mètres de la limite du terrain. Gustavo Poyet arrive au milieu de ses joueurs, un peu enfoncé dans un cache-cou le protégeant du froid. Le coach uruguayen tape dans les mains pour motiver son monde. « On met les buts les gars » demande Eric Bedouet, le visage fermé. Une armée de joueurs prépare la cage côté entrée du terrain et d’autres, dont Paul Baysse et Jaroslav Plasil, rejoignent l’opposé en trottinant pour s’occuper du but placé le long du terrain qui attend d’être installé. Pendant que Pierre Espanol et Fernando discutent, Eric Bedouet prend en charge l’échauffement, à gauche des filets de tennis-ballon, dans une zone vierge de matériel. Dans le sens de la largeur, les joueurs commencent à enchaîner les petites courses. Sur la première foulée, Younousse Sankharé serre la main d’Eric Bedouet. Les joueurs, peu réchauffés, enchaînent les ouvertures et fermetures de jambes. Pour se prémunir du froid sec, chacun a sa méthode. Youssouf Sabaly a opté pour le short mais s’est couvert d’un bonnet, à l’instar de Mauricio Taricco, en survêtement qui a lui aussi choisi le bonnet. François Kamano et Valentin Vada ont tous deux opté pour une couverture totale avec un combiné collant sous le short, cache-cou et manches longues, et la tête également bien protégée.

« Allez on bouge » insiste Eric Bedouet. Quelques paroles en Brésilien fusent du magma représenté par le groupe de joueurs en action. Pablo ralentit au niveau de Fernando placé en observateur et blague quelques instants avec son entraîneur. « On bouge, oh ! Malcolm, allez ! » Eric Bedouet insiste et durcit légèrement le ton. Le préparateur physique bordelais sait que les récentes températures en baisse ne doivent pas être envisagées à la légère. « J’ai laissé deux minutes trente pour se mettre en route maintenant ça y est » s’agace de nouveau Eric Bedouet. Les joueurs commencent à se mettre dans le rythme et accélèrent puis balancent une jambe d’un côté puis d’un autre. « En arrière un peu, on fait travailler les ischios, on ne s’arrête pas » demande Eric Bedouet. Les joueurs se font face et effectuent quelques pas chassés en miroir avant d’accélérer sur la fin et de rééditer l’opération en se tournant le dos. Au loin, de l’autre côté du terrain, mais à l’extérieur, Igor Lewczuk en haut de survêtement et short, fait un footing avec le kinésithérapeute David Das Neves. Chez les gardiens, en train de travailler côté entrée du terrain, Costil, Mandanda, Prior et Poussin accueillent un petit nouveau, le jeune Corentin Michel des U19. Un travail d’appui est demandé au gardien présent dans la cage. Ce dernier passe entre deux piquets, réceptionne une passe de Franck Chaumin à la main, bloque le ballon avant de le rendre à l’entraîneur des gardiens, se tourne vers la gauche pour bloquer au sol la frappe d’un coéquipier excentré. Paulo Fernandes qui prête désormais main forte à cette confrérie des gardiens observe l’échauffement, silencieux. 

Les joueurs de champ qui en ont terminé se dirigent rapidement vers le rond central qu’ils délimitent pour un toro. Toute l’équipe est présente et trois joueurs, chasubles jaunes fluo à la main, sont au centre du terrain et doivent intercepter le ballon. Les équipes fonctionnent par groupes de trois. Si l’un des joueurs de ces groupes perd le ballon, les trois prennent la place au centre. Gustavo Poyet donne quelques consignes sur le nombre de touches de balle. « Non je ne joue pas là » répond l’entraîneur bordelais à la question de l’un de ses joueurs. Les hostilités commencent et un premier imbroglio sympathique éclate. Une passe aléatoire de Pablo touchée de manière désespérée par Contento pose la question du fautif, et donc de celui qui prendra position au centre du terrain. Les joueurs dialoguent, protestent. Gustavo Poyet intervient et se place physiquement au centre des débats. « Pablo ? » l’entraîneur des Girondins interroge ses joueurs qui votent à main levée. « Contento ? » demande le technicien bordelais qui déclenche l’hilarité de son groupe. Les joueurs lèvent de nouveau la main. Le groupe choisit Pablo qui prend la chasuble. « En l’air ça joue » encourage Fernando Menegazzo sur un ballon aérien que Cafu dispute à Pellenard dès sa retombée, laissant légèrement trainer le pied. « Attaque le ballon » conseille Plasil à son jeune coéquipier avec un sourire en coin. Les gardiens poursuivent leur entraînement de leur côté, sur le même schéma qu’en début de séance, mais la frappe excentrée est désormais adressée avec un ballon lesté.

 

Les joueurs plaisantent sur le toro, et les chasubles changent régulièrement de mains. Les abords du terrain sont désormais bien garnis de spectateurs qui voient François Kamano regarder à droite tout en faisant une passe à gauche faisant tomber Sankharé dans le piège. « Olé » crient les joueurs. Bon perdant, Younousse Sankharé, sourire aux lèvres, continue son pressing à l’opposé, et Fernando, poursuit son décompte des passes avec une envie de rire pendue aux lèvres. « Ouais. » Les gardiens s’expriment fort. Chaque goal, entouré d’une forêt de portiers doit s’imposer et saisir un ballon haut de Franck Chaumin avant de se coucher sur une frappe de Paulo Fernandes. La petite équipe travaille dur. Gustavo Poyet qui observait le toro de l’extérieur siffle et répartit les groupes qui s’éparpillent rapidement. Les joueurs offensifs, sans Nicolas De Préville absent de la séance, se positionnent sur l’atelier campé par les mannequins dans le rôle d’adversaires fictifs. Près de la main-courante, Meïté-Lerager-Cafu affrontent Sankharé-Otavio et Plasil sur l’un des tennis-ballons. À l’opposé, les défenseurs sont de nouveau entre eux. Les centraux Baysse, Koundé, Pellenard et Pablo disputent un match face à Poundjé, Gajic, Sabaly et Contento. Le tennis-ballon n’a pas commencé que Meïté donne une accolade à Lerager. Les deux anciens joueurs de Zulte-Waregem affichent une complicité humaine importante. Les attaquants commencent par un circuit simple. Un premier joueur est à hauteur du mannequin côté droit et dos au but et trouve un coéquipier axial en retrait entre deux autres mannequins. Ce dernier, après un contrôle orienté, effectue une passe à un troisième coéquipier, légèrement excentré côté droit. Le joueur censé finir doit d’abord réaliser lui aussi un contrôle orienté entre deux mannequins avant de pouvoir frapper au but.

Pierre Espanol, auprès des attaquants, donne ses premières indications à mesure que ses joueurs enchaînent :  « Allez bien vers l’avant, gagnez un mètre sur les défenseurs. » Un bruit de claque légère et régulière sur le ballon et apaisant retient l’attention du côté du tennis-ballon où les joueurs mettent de l’application, désireux de remporter le petit match. Otavio amortit un ballon de la poitrine pour Sankharé qui renvoie le ballon chez les adversaires. Le jeu est fin. Gustavo Poyet, sourire aux lèvres, rejoint Fernando pour observer ses joueurs quelques instants. « Sans forcer, je ne veux pas que vous forciez. C’est la gestuelle » tonne Pierre Espanol du côté des attaquants. La répétition des mouvements légers vers l’avant est prioritaire pour se mettre dans le sens du but. Le ballon part désormais de l’opposé pour arriver sur un frappeur à gauche. Braithwaite croise une frappe sèche du pied droit qui finit dans le petit filet gauche du gardien. « Mettez de la vitesse dans la passe et l’intervalle » insiste Pierre Espanol. Braithwaite change de pied et place une frappe lourde du pied gauche que Mandanda sort de la main opposée. Les joueurs doivent s’écarter au maximum des mannequins lors de leurs enchaînements, comme s’ils cherchaient à semer les défenseurs dès le premier geste. Sur le toro des milieux, Fernando observe attentivement, les mains dans les poches. Les yeux de l’ancien milieu défensif girondin n’en loupent pas une miette. Un peu transi par le froid, l’ex- joueur technique semble ronger son frein et observe le ballon avec envie. Otavio a le sourire aux lèvres. En face, Lukas Lerager a lui aussi un rictus joyeux sur chaque passe, ravi d’évoluer avec Souhalio Meïté. Le milieu défensif prêté par l’AS Monaco donne un ballon qui semble parti pour s’écraser dans le filet mais Lerager s’arrache pour le sauver et touche le filet en faisant passer le ballon de l’autre côté. « Bien joué Lukas » s’enthousiasme Meïté. Le son de cloche est différent de l’autre côté où Plasil, Sankharé et Otavio contestent la validité du point. Fernando tranche en faveur de l’équipe Plasil. « Bien joué l’arbitre » applaudit Sankharé en s’adressant à son coach. Les attaquants ont enrichi leur travail. Le départ se fait toujours de façon excentrée. Un une-deux est effectué avec le joueur en retrait. Le premier joueur trouve un partenaire en appui près de la surface qui remet instantanément au deuxième joueur qui frappe après être passé en vitesse par la porte formée par deux mannequins. Chaque joueur change de position au fur et à mesure que le circuit progresse. « Valé, oriente-toi, relâché, c’est mieux » demande Pierre Espanol à Vada. Les conseils du technicien font mouche et le milieu offensif argentin marque d’une frappe croisée.

Des rires fusent du côté du tennis-ballon des milieux, en écho à celui des défenseurs à l’opposé où la joie de vivre prédomine. Otavio vient de tacler et de finir dans le filet. « C’est deux points ça » demande Meïté. « Allez sérieux » décrète Sankharé avant de réengager le jeu. À quelques mètres des deux trios, Benoît Costil travaille dans l’ombre. Franck Chaumin adresse des passes courtes sur l’aile à Gaëtan Poussin qui tape des ballons flottants en direction du but pour permettre à Costil de travailler le jeu aérien. La séance des attaquants n’a pas atteint l’intensité des dernières semaines. Parti depuis le côté droit en regardant les buts, le circuit n’offre pas beaucoup de réussite aux attaquants. Kamano trouve un poteau, les frappes prometteuses de Malcom et Laborde passent de justesse à côté et Corentin Michel freine un tir de Valentin Vada en se couchant au bon moment. Petit à petit, presque sans s’en apercevoir, les milieux de terrain du tennis-ballon plient bagage, suivis par Benoît Costil qui se soumet de bonne grâce à quelques photos et reste discuter avec un groupe de personnes en dehors du terrain. Après avoir continué à jouer l’un face à l’autre, tout sourire, Plasil et Meïté finissent pas rendre les armes. Jaroslav Plasil et Fernando démontent le matériel et rangent les tubes de fixation des filets dans de longs étuis. Petit à petit le terrain se dépeuple, et même Gustavo Poyet a quitté la pelouse, laissant ses attaquants terminer leurs pénaltys. Pendant que Malcom, en dehors du terrain, tape dans la main de quelques jeunes réservistes ayant fini leur séance et échange une bise avec Mathieu Chalmé avec qui il partage quelques mots, les défenseurs, sans filets, continuent de se faire des passes en mode tennis-ballon. Insatiable, malgré le froid qui ralentit les mouvements, l’équipe défensive prend plaisir à évoluer ensemble, encore un peu. En devenant solide depuis plusieurs matchs, la cohésion défensive continue d’être cimentée comme nourrie par l’hiver enfin véritablement présent. Un signe à ne pas négliger avant un match peut-être rugueux face à Amiens samedi soir à 20h, face à un promu dans un match typique du mois de février.

Par Florian RODRIGUEZ au Haillan

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