Interview - Guillaume Duriatti : "Le président en poste a tout fait pour saborder notre projet"

07/06 - 11:39 | Il y a 3 ans
Nous nous sommes entretenus avec Guillaume Duriatti. Scout et recruteur expérimenté, il a structuré et organisé le projet sportif des Girondins de Bordeaux pour le compte de l’homme d’affaires Bruno Fievet.
Interview - Guillaume Duriatti : "Le président en poste a tout fait pour saborder notre projet"

© Iconsport

Presque une semaine après avoir été évincé de la course au rachat des Girondins, il a répondu à nos questions.

Comment allez-vous Guillaume ? Avez-vous digéré la nouvelle ?

Je ne vais pas vous mentir, il y a eu deux nuits très courtes. 

Comment vous êtes-vous retrouvé dans cette aventure ?

J’ai rencontré Bruno il y a un peu plus d’un an et demi, on a échangé et j’ai senti quelqu’un amoureux du club. Je connaissais Bordeaux surtout par Éric Guérit qui est un ami. On échange beaucoup sur ce qui se passe au club . Et là, tu as un passionné qui arrive et qui me présente son club. Je ne connaissais pas bien Bruno. Au final, quand tu as quelqu’un de passionné, il t'apprend à aimer son club. J’ai trouvé ça vraiment intéressant. Il m’a fait part de son envie de reprendre son club alors que King Street n'était pas du tout vendeur. Même si cela paraissait utopique au départ,  je lui ai proposé différentes façons de travailler et des noms de personnes. Finalement, il fait une première offre à King Street où il n’a jamais eu de réponse. Ensuite, il prend la décision de stopper au mois d’avril, car ils ne sont pas vendeurs.

Puis, King Street est vendeur, Bruno m’appelle et il me dit : « on a déjà tout, on est plus que prêt ». Je lui dis OK. Tu as tout, tu es amoureux du club, tu me fais échanger avec du monde qui aime ce club, j'ai envie de travailler dessus. On a bossé pendant 3 semaines assez intensivement pour mettre en place une structure sportive. J’ai pris en charge l’organisation de la structure sportive, car j’étais sans club : j’ai appelé des personnes pour les postes de directeur général, directeur du recruteur, les recruteurs, et quelques entraîneurs pour sonder un peu.

Ce qui m'a plu et touché, c’est d’avoir des gens prêts à aller à la guerre pour le bien de leur club. C'est ce qui m'a plu. Donc j’ai suivi, car ça rentre dans ma philosophie et ma vision d'un club de football. 

"Si on s’était battu à armes égales..."

Guillaume, est-ce vraiment digéré la déception de ne pas avoir été choisi aujourd’hui ?

Si on s’était battu à armes égales, la digestion serait plus facile.

C'est-à-dire ?

Je pense qu’il n’y a qu’un seul décisionnaire c’est King Street. Les intérêts financiers sont les premiers. C’est le plus important. Nous, on a été les seuls à ramener projet sportif, mais ils s’en foutent. Ils ont été très clairs, cela ne les intéresse pas. Ils souhaitent avoir le plus d'agents possible. En plus, on est surpris, car l’offre était conséquente. On avait une très belle offre. On sait que des dossiers ont été acceptés avec une offre inférieure, voire très inférieure à la nôtre. Ça m'a le plus surpris.

Comment l’expliquer ?

Aujourd’hui, on a les réponses. On sait que le président qui est encore en poste a tout fait pour saborder le projet, car il a des différends avec Bruno Fievet. S'il veut le faire, il le fait. C’est dommage, car on s’est mouillé dans cette histoire. Perdre à armes égales c’est le jeu, mais perdre comme ça c'est rageant et frustrant. Tu te dis que cela n’a pas été honnête.  

"Il y a tout ce qu’il faut pour travailler en Aquitaine"

C'était quoi la vision du projet sportif pour les Girondins ? Ça représentait beaucoup de travail ?

En tout et pour tout c’est deux bons mois de travail avec des nuits courtes. On travaille sur les schémas organisationnels en fonction du club. Tu ne peux pas venir et imposer ta façon de travailler, car chaque club a sa manière de fonctionner. Il faut déjà s'imprégner de ce qui se fait, ce qui s’est fait, voir ce qui a marché et pas marché. On travaille en fonction du club. On a voulu mettre en place une structure la plus opérationnelle et la plus réactive en termes de décisions, avec des chemins courts. Et ensuite quand le schéma est fait, c'est choisir les hommes au bon endroit.

Notre projet était basé sur la formation des jeunes, sur le rapprochement avec les clubs locaux pour augmenter et améliorer la formation avec les gens du cru. Il y a tout ce qu’il faut pour travailler en Aquitaine. En équipe première l’objectif était de trouver une stabilité dans l’effectif, de réduire les contrats, le groupe et souder l’équipe. Ensuite, nous voulions apporter des touches à chaque mercato, pour la troisième année jouer une saison intéressante dans le haut du tableau de la Ligue 1. C’est ça notre objectif sportif. Il fallait bien réfléchir à comment bien structurer le club compte tenu de son état.

Les personnes contactées ont accepté assez facilement de rejoindre ce projet ?

Ah oui. Déjà parce que je les connais. Bruno les a tous eus au téléphone et ils ont eu la même impression que moi, le même ressentit. On a affaire à un mec passionné qui va aller au bout de son truc sans dérailler. Il sait où il va. Dans le sportif pour nous, c’était plaisant. On savait qu'un mec allait gérer ça d'une main de fer. C'est rassurant pour nous au sportif, car tu sais comment tu vas travailler en optimisant au maximum nos ressources.

"J'y croyais à notre projet"


Et vous Guillaume, vous êtes toujours scout et sans club aujourd’hui ?

Je vais encore digérer un peu, car j'étais jour et nuit dans ce projet. J'y croyais à notre projet. Je vais prendre du recul. J’ai refusé des offres lors de ces trois derniers mois. Je suis quelqu’un de loyal, j'étais engagé. Donc je vais attendre de voir comment ça se passe aux Girondins avant de retrouver un club.

Si j'étais deux ans et demi sans club, c’est qu’il y a une raison. J’ai refusé pas mal de clubs, de très gros clubs européens (MU, Arsenal), car j’ai besoin de me projeter dans mon club. Si leur façon de travailler ne coïncide pas avec ma philosophie de travail, je ne vais pas m’éclater. J’ai fait ce choix. Je ne me sentais pas capable de travailler avec les gens en place. On n'avait pas la même vision du foot.

C’est votre vision du foot ?

Déjà, il ne faut pas oublier que le football c'est avant tout un loisir qui s’est professionnalisé. C’est un divertissement, c’est du spectacle pour les gens. À partir du moment où tu as le business qui prend le dessus c’est très compliqué, car l’intérêt financier passe avant tout le reste. Donc, le divertissement pour les gens on s'en fout, ce qui intéresse c’est le déficit et le bénéfice que tu auras à la fin de la saison. Quand tu commences à travailler avec des gens comme ça, c'est très compliqué, même pour moi c'est très dur. Moi mon job, c’est de voir des matchs, d'observer, de découvrir des joueurs et de les proposer à mon club.  Ensuite, tu as celte fierté de dire, j’ai fait venir ce gamin, il a découvert le club, il va plus haut, il fait gagner de l’argent au club et tout le monde et content. Aujourd’hui, en France tu le trouves de moins en moins, ça c'est dur.

"Si on est approché par un projet de rachat des Girondins, aujourd’hui il va falloir discuter clairement de l’ambition du projet"

Ce projet a-t-il encore un espoir d’aboutir aux Girondins ou ailleurs ?

Si je dis à Bruno (NDLR Fievet) qu'il y a un autre club en vente, il va me dire non. Je suis sûr qu’il me répondra ça. Il est profondément attaché à Bordeaux. Il habite dans le secteur. Il est très bien. Je suis certain qu’il me dira non si on lui propose un autre club. Par contre, si on est approché par un projet candidat au rachat des Girondins, aujourd’hui il va falloir discuter clairement de l’ambition du projet. On ne les connaît pas. Mais Bruno est ouvert à ça. 

La vente des Girondins peut-elle aller au bout sans passer par le redressement judiciaire ?

Je l’espère pour le bien du club. Bien évidemment, je le souhaite. Aujourd'hui, tu as 4 dossiers, tu ne connais rien, que ce soit sur le sportif ou le financier. Il faut faire confiance aux gens qui décident, même si c’est difficile, tu n'as pas le choix. Il faut espérer que cette vente se poursuive jusqu’au bout. On parle de vente, de vente, mais on ne parle plus du club des Girondins. Il ne faut pas oublier le club et ses salariés.

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