Toulouse, le violet vire au rouge

20/03 - 06:30 | Il y a 10 ans

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Toulouse, que peu d’observateurs voyaient lutter pour le maintien, a rarement été aussi en danger depuis son retour dans l’élite en 2003. Auteurs d’un parcours trompeur en championnat, les Toulousains, à 3 points d’Evian avec un goal-average défavorable, accueillent leurs rivaux girondins avec le couteau sous la gorge.

La forme de l’équipe

À 9 matchs de la fin du championnat, Toulouse est en très petite forme. Alain Casanova, le coach garant de l’esprit toulousain, a été remplacé en début de semaine par Dominique Arribagé suite à des résultats qui ont amené inexorablement le club violet en queue de peloton. La saison toulousaine est un trompe-l’oeil pour les observateurs. Irréguliers comme la majorité des formations françaises, les Toulousains ont longtemps flotté au dessus de la zone rouge sans donner l’impression d’être en danger. Les joueurs d’Alain Casanova ont été auteurs de quelques belles victoires en début de saison avant de rentrer dans le rang (victoire 2-1 face à Lyon en août au Stadium, net succès à Rennes 0-3 en septembre, ainsi que 3 points de haute volée glanés à Saint-Etienne, 0-1). Et c’est à partir du milieu du mois d’octobre que les choses se sont corsées avec des résultats décevants amenant le TFC à flirter avec les relégables à la fin de la première partie d’exercice (15eme avec 3 points d’avance sur Evian). 2015 a ensuite confirmé la lente descente du club d’Olivier Sadran qui a hérité de la place de premier relégable au soir de la 26eme journée. Six défaites depuis la reprise ont confirmé le déclin toulousain avec notamment deux résultats marquants : une déculottée à domicile face à Marseille 1-6 et une défaite à Lens, 19eme du classement, 1-0. Avant de recevoir Bordeaux, Toulouse a confié son destin à un ancien emblème de la maison, Dominique Arribagé, pour tenter de sauver le club haut-garonnais des eaux de la L2.

Les joueurs, l’effectif

Toulouse dispose d’un effectif très éclectique, dicté par des moyens financiers réduits. Si Abel Aguilar a réalisé une belle Coupe du Monde avec la Colombie, que le milieu toulousain est intéressant sur le papier avec Etienne Didot, l’expérimenté Pantxi Sirieix ou le technique et physique Tongo Doumbia, la défense n’est pas à la hauteur. L’inventaire commence par le poste de gardien de but où ni Zacharie Boucher, ni Ali Ahamada n’ont eu la confiance d’Alain Casanova (respectivement 15 et 14 matchs) pour diriger à temps complet la moins bonne défense de L1 (49 buts encaissés). Jean-Armel Kana-Biyik qui ne jouait plus à Rennes semblait être la belle affaire du mercato toulousain, mais les 5 matchs disputés n’ont pas rassuré le joueur et les techniciens. À la décharge de l’ancien rennais, les défenseurs serbes Uros Spajic ou Dusan Veskovac à ses côtés, connaissent de grandes difficultés à s’adapter à la L1 d’un point de vue technique, imités par le roumain Dragos Grigore. Un milieu irrégulier, une défense aux abois, et une attaque qui, elle, comporte quelques individualités qui fonctionnent. Martin Braithwaite n’a inscrit que 3 buts, mais reste un élément correct. Wissam Ben Yedder, de son côté, continue à scorer, avec 9 buts au compteur. Enfin, Aleksandar Pesic représente à merveille la fortune variée du recrutement international toulousain. Lui aussi serbe comme ses compatriotes de la défense, l’attaquant réalise une première saison française honnête avec ses 27 matchs joués et ses 6 buts et 3 passes décisives. Malgré un profil laborieux, l’attaquant de 22 ans semble avoir de l’avenir mais a besoin de temps pour progresser. Un temps dont Toulouse ne dispose plus à neuf journées du dénouement de la L1.

Les statistiques :

L’analyse du jeu : l’exemple de Toulouse-Marseille

La dernière prestation toulousaine à domicile face à Marseille fut extrêmement douloureuse avec un revers 1-6. Cette rencontre marqua la grande fragilité défensive des joueurs de l’ancien coach Alain Casanova. Totalement perméables, les Toulousains ont payé leur façon de mener le jeu. Généreux dans leurs attaques, avec souvent un joueur plein axe à côté de Ben Yedder pour gêner la défense adverse, les joueurs de la ville rose ont oublié la notion de bloc-équipe. Coupés en deux entre les joueurs qui participaient aux joutes offensives et les éléments restés en positions défensives, les Toulousains ont subi de plein fouet les moindres contres marseillais. Les joueurs de Marcelo Bielsa ont pu profiter de l’absence de couverture au milieu pour venir agresser une défense trop basse et trop loin de la zone de possession du ballon. Plusieurs actions coûtèrent très cher avec un axe central Kana-Biyik-Spajic très peu mobile et souvent en retard, et des latéraux (Moubandjé et Akpa-Akpro) qui se concentrèrent dans l’axe, oubliant leurs vis-à-vis dans les couloirs. Les Olympiens profitèrent à merveille de ces problèmes de placement pour balayer rapidement le terrain et se servir des espaces vacants pour créer des situations très dangereuses. Les Girondins de Bordeaux devront se servir de cette lacune au niveau de l’adaptation tactique en profitant des espaces laissés libres par les latéraux qui compensent l’absence des milieux récupérateurs sur les phases de contres en resserrant l’axe central. Mais le changement d’entraîneur, avec un regard neuf et des dispositions tactiques peut-être plus rigoureuses, pourra obliger Bordeaux à faire preuve de plus d’imagination pour marquer.

3 questions à… Arnaud Souque (Journaliste à Radio France - Commentateur pour France Bleu Toulouse)

WebGirondins : Avec le recul, est-ce surprenant de retrouver Toulouse en danger à neuf journées de la fin du championnat ?

Arnaud Souque : Quand on voit le début de saison de Toulouse, on ne peut qu’halluciner. Par exemple, lorsque Toulouse reçoit Paris au Stadium au match aller, les Toulousains doivent rentrer aux vestiaires avec trois buts d’écarts tant ils ont d’occasions dans le match. J’ai en tête le match face à Caen avec un 3-3 plein d’intensité ou encore la performance contre Lyon et ce 2-1 à domicile. Le 3-5-2 d’Alain Casanova a été assez critiqué, mais ça n’a pas mal marché pendant un bon moment. Mais avec le recul, on se rend quand même compte qu’il y a eu un problème de recrutement surtout défensivement. Quand on prend Grigore ou Kana-Biyik, il y a des problèmes de performances. Sur le moment, on ne se rendait pas compte de ces lacunes car l’équipe marquait et que Ben Yedder était en forme, mais le souci c’est que ce joueur n’aime pas du tout l’hiver et décline lors de cette période. Et là les problèmes défensifs ont été plus visibles avec le manque d’efficacité devant. Le problème de Toulouse est là : dans le recrutement. Paradoxalement, on a des exemples avec Gignac ou encore Rabiot lorsqu’il a été prêté : Quand le TFC a recruté en France, il s’est rarement trompé, alors que son recrutement étranger est souvent très aléatoire. Disons que malgré tout, avec l’effectif en présence, ce serait une catastrophe industrielle de voir Toulouse descendre en L2.

WebGirondins : Que pensez-vous du changement d’entraîneur et de staff technique ?

Arnaud Souque : C’est très bien parce que Dominique Arribagé entouré de Mickaël Debève et Teddy Richert représentent des gens du club. Mais très honnêtement, je ne pense pas que cela change grand chose. Alain Casanova était apprécié de ses joueurs, il ne semble pas y avoir eu de cassure avec son vestiaire. C’est un grand connaisseur de football, mais qui a fait office de fusible, prenant tout pour lui pour défendre le club médiatiquement. Le nouveau coach va compter, mais ce sont d’abord les joueurs qui vont devoir réagir. On pourrait mettre Carlo Ancelotti, je ne sais pas si cela aurait une influence à l’heure actuelle. C’est aussi une question de niveau, de talent, de potentiel. Grigore derrière restera Grigore quelque soit l’entraîneur. La seule note positive c’est que le calendrier de Toulouse n’est pas démentiel et reste soft d’ici la fin du championnat.

WebGirondins : Comment voyez-vous ce Toulouse-Bordeaux ?

Arnaud Souque : Je le vois un peu comme un match de la mort. Si Toulouse perd contre Bordeaux et que de l’autre côté Evian l’emporte face à Montpellier, je pense que ce sera fini pour Toulouse. 5 points de retard avant la 31eme journée, cela me paraîtrait trop important. En trois rencontres cette saison le TFC n’a pas trouvé la recette face à Bordeaux. Les Girondins viennent de battre Paris, réalisent une belle deuxième partie de saison avec des Khazri ou Plasil qui sont très en forme. En face, j’ai peur que Toulouse confonde vitesse et précipitation avec l’idée de se racheter du gros revers subi face à Marseille lors du dernier match à domicile. Si je devais faire un pari, ça me fait mal de dire ça parce que je suis Toulousain d’origine, mais je miserais sur une victoire bordelaise.

Florian Rodriguez

#Ligue1