Carnet d’entraînement : Frapper au but, inlassablement

05/04 - 19:20 | Il y a 8 ans
Carnet d’entraînement : Frapper au but, inlassablement

© Iconsport

Jeudi 5 avril 2018 - Le Haillan : Au cours d’une séance avec deux groupes d’entraînement, Gustavo Poyet a passé beaucoup de temps avec les attaquants. Sous un soleil agréable, les joueurs offensifs ont enchaîné les frappes dans différentes positions.

C’est désormais un rituel immuable, chaque veille de huis-clos, Gustavo Poyet emmène ses joueurs travailler leurs gammes sur l’ancien terrain de l’équipe de CFA. Le tableau serait presque habituel si un petit chapiteau bleu marine, ouvert pour permettre une vision sur le terrain, ne venait pas distraire l’oeil du spectateur. Cet édifice aux allures de tonnelle est réservé à quelques abonnés ayant gagné un petit déjeuner au Haillan et une découverte privilégiée du château. Sur le terrain, les joueurs presque au complet - seul Younousse Sankharé manque à l’appel - se font des passes dans le plus grand des calmes et sous un temps agréable exempt de ce vent presque indissociable de la plaine des sports du Haillan. Gustavo Poyet se saisit rapidement de son sifflet et convoque ses joueurs qui se placent en rangées de deux et commencent un échauffement au milieu de terrain sous la houlette d’Eric Bedouet.

Placés dans le sens de la largeur, les joueurs débutent par des ouvertures de bras. Viennent ensuite des courses avec changements d’appuis, des petits pas en miroirs avant d’accélérer sur la fin ou encore des sauts sur une jambe puis sur l’autre en alternance. Eric Bedouet est attentif, buste penché vers l’avant, observant les mouvements des jambes. Les gardiens, eux, se font des passes en petites volées, du pied à la main. Poussin et Mandanda travaillent ensemble et Costil est en binôme avec le jeune Davy Rouyard. Le capitaine bordelais règle le positionnement de son coéquipier en lui faisant signe de s’avancer. Les abords du terrain d’entraînement se sont garnis et même les spectateurs sont calmes. Une drôle d’atmosphère flotte, presque empreinte de torpeur. Tous les joueurs, à l’exception des gardiens, sont conviés à un toro géant avec trois joueurs au centre du jeu. Un ballon fuse, Zaydou Youssouf tente de l’intercepter en taclant mais n’y parvient pas et quelques applaudissements fusent pour casser le silence. Du côté des gardiens, et sous l’impulsion de Paulo Grilo, on plonge en avançant et en se relevant sur des frappes successives. 

 

Tandis que l’ambiance commence à se faire chez les joueurs du toro, les gardiens continuent de s’échiner à capter les ballons. Benoît Costil plonge sur un ballon de côté puis revient dans l’axe entre deux mannequins, face à Paulo Grilo qui déclenche une frappe sourde. « Super Costil ! Magnifique Costil » s’enthousiasme Paulo Grilo avec une grosse voix enrobée d’un accent portugais. « Très bien Mandanda » continue l’entraîneur des gardiens en accentuant les deux dernières syllabes du nom du gardien girondin. Seul, à égale distance du toro et des gardiens, Gustavo Poyet effectue des pas chassés, quelques courses simples, s’étire, puis jongle avec le ballon. Le toro accélère légèrement et Malcom lève le pied au dernier moment sur un pressing de Tchouaméni et Lerager un peu plus intense. Mauricio Taricco qui est près de ses joueurs regarde sa montre. À quelques mètres de lui, Gustavo Poyet prend des notes sur son carnet de coach et relit quelques indications. La phase d’entraînement s’allonge. Mais Gustavo Poyet y met fin quelques minutes plus tard par deux coups de sifflets brefs. Le technicien uruguayen débite des noms au couteau. Les joueurs offensifs composés de Laborde, Vada, De Préville, Braithwaite, Kamano et Malcom se dirigent vers la surface de réparation côté entrée du terrain. Le reste du groupe migre à l’opposé.

« Cinq minutes de ballon avant » avertit Gustavo Poyet. Les joueurs des deux camps commencent à enchaîner des passes simples en attendant la suite du programme. « Très bien Mandanda » insiste Paulo Grilo, particulièrement en forme. Face aux gardiens, une mini-caméra sur trépied film les séquences. L’entraîneur des goals enchaîne les frappes avec rebond et ne ménage pas ses hommes, frappant avec force dans les ballons qui viennent claquer contre les gants. « Très bien Davy, magnifique Davy » encourage Paulo Grilo devant une séquence de Davy Rouyard. Les joueurs de champ, eux, commencent à se mettre en place. Benrahou et Youssouf se positionnent sur un espace de tennis-ballon excentré, près des spectateurs, et s’apprêtent à y affronter Plasil et Sabaly. À quelques mètres de là, les attaquants se suivent en file indienne et attendent de débuter sous l’impulsion de Gustavo Poyet. À l’autre bout du terrain, quatre latéraux sont positionnés en miroir. Un gaucher et un droitier sur chaque aile sont censés délivrer des centres. Dans le circuit que propose cet exercice, deux joueurs partent des cages adverses. Le premier allonge en diagonale pour la latéral opposé qui centre, et les deux joueurs doivent effectuer des courses croisées dans la surface. Benoît Costil garde une cage, et Over Mandanda la deuxième. Les défenseurs participent également à cette séance et Lewczuk est le premier à frapper de demi-volée sur la barre. Jules Koundé, lui, manque le cadre de près. « Attention » prévient Fernando voyant le ballon aérien de son défenseur arriver vers un spectateurs près de la main-courante pourtant distante de quelques mètres. Les centres sont assurés par Contento et Gajic d’un côté et par Poundjé et Cafu de l’autre.

Gustavo Poyet, dos au spectateur et à l’entrée de la surface, distribue les ballons en hauteur et à la main pour ses attaquant qui enchaînent les frappes face à Gaëtan Poussin et Davy Rouyard. Les contrôles en hauteur et les frappes instantanées se multiplient. Chaque joueur effectue plusieurs frappes avant de rétrograder et de se retrouver en queue de peloton. François Kamano frappe deux fois au dessus, Malcom connaît une réussite mitigée commençant par frapper largement au dessus puis marquant d’une frappe croisée du pied gauche. Le jeune brésilien trouve Rouyard sur sa route sur une grosse frappe dans l’axe et tente enfin un ciseau qui fuit le cadre après avoir contrôlé son ballon vers l’arrière. Côté ambiance, seul un tracteur qui s’évertue à gratter une surface de terre sur le terrain de l’équipe réserve vient casser la quiétude ambiante. Gustavo Poyet a regroupé des ballons sur le côté droit de la surface et enchaîne les passes rasantes. Les joueurs passent, les tours s’enchaînent, et les résultats sont homogènes : quelques beaux buts, plusieurs frappes ratées, et de rares arrêts des gardiens. Gustavo Poyet se rapproche de ses joueurs et montre quelques gestes avec le pied. Mais l’entraîneur bordelais ne s’éternise pas et s’attache à redonner des ballons en hauteur, à la main, mais du côté gauche cette fois-ci. Braithwaite marque d’une frappe croisée et frappe de peu au dessus du milieu de la barre transversale. De Préville l’imite effectuant les deux mêmes gestes. 

Le bruit métallique du grillage protégeant le terrain se fait souvent entendre, au gré des ballons non-cadrés qui viennent taper la structure. Rouyard met un genou dans la partie dénuée d’herbe devant les gardiens et un petit nuage de poussière s’envole, donnant un air bucolique à ce terrain présentant plusieurs nuances de vert dues à une pelouse dans un état correct mais inégal. Malcom manque de peu d’envoyer un ballon au dessus des filets de protection surplombant le grillage. Vada, lui, exulte après avoir marqué trois buts sur quatre frappes, tout en se replaçant lentement : « J’ai une de ces pâtes gauche mon gars. » Les ballons sont désormais davantage levés et Gustavo Poyet précise : « Si vous pouvez, allez plus vite. » Les autres joueurs de champ, à l’opposé, ont changé leur entraînement. Deux files de joueurs se font face, chacune à hauteur d’une cage. La première, située côté milieu de terrain, permet aux joueurs de jouer un une-deux avec Fernando positionné sur la droite avant de frapper au but de loin. À l’opposé, Mauricio Tarrico, propose le même type d’enchaînement, mais en sens inverse. Plus personne ne joue au tennis-ballon et tout le monde participe à la séance. Lancé côté gauche face à Gaëtan Poussin qui est passé sur cet atelier, Benrahou frappe de manière croisée. Le gardien se couche et repousse le ballon mais le milieu offensif girondin a suivi et marque de près.

Benoît Costil qui gardait la cage au bout du terrain passe dans le dos des spectateurs et quitte la zone d’entraînement, visage fermé. Au même moment, Gustavo Poyet s’adresse à l’un des joueurs du groupe des attaquants : « Je sais que t’as mal, je sais que t’es pas bien, mais tu dois bien finir. » L’entraîneur girondin s’est reculé et s’est placé au niveau de la ligne de sortie de but, du côté droit en regardant les gardiens. Les passes adressées par l’entraîneur des Girondins arrivent au-delà de l’arc de cercle et les frappes lointaines s’enchaînent elles aussi. Et la réussite fuit les joueurs. Kamano frappe largement au dessus, Laborde tire à côté et Vada prend un ballon de la semelle qui arrive lentement jusqu’au gardien. Au fond du terrain, les joueurs ont repris le travail de transversales et de centres. Sur l’un d’eux, Paul Baysse marque sous la barre du plat du pied. Benrahou côté gauche adresse un centre pour Lerager qui frappe au dessus malgré une position très proche des buts, au niveau du point de pénalty. Après avoir changé de côté au niveau de la ligne de sortie de but, Gustavo Poyet s’est positionné en tant que centreur. De Préville reprend sur la barre. Malcom manque son geste, écrase sa frappe, mais le ballon vient lober Poussin et finir sa course dans les cages. « Oh la vache » s’exprime un Gaëtan Poussin dépité face à un Malcom amusé par la réussite fortuite de son geste. Braithwaite et De Préville frappent haut, très haut, à tel point que le ballon quitte les limites du terrain. Un intendant préposé à récupérer les ballons file à toute allure sur un terrain adjacent. Les centres de Gustavo Poyet viennent maintenant de la gauche. Nicolas De Préville, assez près du gardien, déclenche une frappe violente qui vient heurter le tibia de Gaëtan Poussin. Le jeune gardien girondin sautille, grimace, et continue d’essayer de repousser sur une jambe les frappes qui arrivent comme des pluies de météorites. « Nico, t’as raison, frappe plus fort » fait remarquer avec dépit le gardien numéro deux des Girondins en alternance avec Over Mandanda avant d’insister : « Nico, tu m’as tué le tibia. »

Les joueurs placés au fond du terrain en ont fini et Paul Baysse s’achemine lentement vers la sortie, l’air songeur et la minute peu réjouie. Les autres joueurs traînent, attendent. Meïté et Sabaly entreprennent, avec le sourire, de faire un tennis-ballon face au seul Pablo. Mais Fernando les rappelle très rapidement : « Les garçons, on passe là-bas. » Les trois joueurs rejoignent l’ancien milieu girondin ainsi qu’Otavio et Koundé pour une vraie partie de tennis-ballon cette fois-ci. Mauricio Taricco qui vient de distribuer les chasubles supervise une dernière opposition libre sur la partie du fond. Davy Rouyard garde les cages des rouges composés de Contento, Lewczuk, Pellenard, Plasil et Benrahou tandis que Mandanda oeuvre avec les sans-chasuble que sont Verdon, Tchouaméni, Gajic, Cafu et Youssouf. Chez les attaquants, les frappes se font presque du milieu du terrain. Braithwaite place une grosse frappe qui tape la barre et retombe devant la ligne. L’intensité n’y est cependant plus et un esprit de tranquillité se dégage de l’ensemble. Seuls Malcom, Braithwaite et Lerager qui s’est joint à eux poursuivent ces frappes très lointaines, en autonomie malgré le regard d’Eric Bedouet. Gustavo Poyet s’est exilé à quelques mètres et observe l’opposition, assis sur un ballon, discutant avec Maxime Poundjé assis lui à même le sol.

Trois légers coups de sifflet mettent fin au petit match. Un silence étrange règne. Mauricio Taricco accompagné du jeune Benrahou, de Tchouaméni et Youssouf participe au rangement des cages. Jaroslav Plasil démonte les filets de tennis-ballon. Davy Rouyard, lui, s’est positionné dans les buts face aux tireurs lointains. Gustavo Poyet et Fernando, non loin, échangent avec un Benrahou attentif. Lerager et Braithwaite s’éternisent. Gustavo Poyet qui en a terminé avec son échange avec Benrahou se rend presque compte que ses deux joueurs sont encore en train de frapper inlassablement de loin et s’adresse à eux : « Allez, montrez-moi. » Une frappe de Lerager plus tard et l’entraîneur girondin décide que les joueurs en ont assez fait : « Allez c’est bon. » Après avoir regroupé les ballons dans un sac et s’en être emparé, Martin Braithwaite reste de longues minutes à discuter avec Gustavo Poyet et Mauricio Taricco. Au loin, de l’autre côté du terrain, la chevelure de Paul Baysse remue au fil de ses pas de course. Solitaire, le défenseur girondin s’est offert un peu de footing en supplément. Pendant que les joueurs se rendent disponible pour les abonnés invités au Haillan, Baysse disparaît au loin. Comme soucieux de s’évader par la course à pied d’un contexte étrange autour de son équipe qui s’apprête à affronter des Lillois à l’agonie, mais pas encore morts, dans un match de bas de tableau surprenant. 

Par Florian RODRIGUEZ au Haillan

#Club