Que peut-on vraiment attendre du cru 2015-2016 ?



20/08 - 11:22 | Par la rédaction | Il y a 11 ans

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Après plusieurs saisons fades depuis la débâcle de Laurent Blanc et son groupe, les Girondins de Bordeaux, sous la houle de Willy Sagnol, semblent gagner en compétitivité. Au point de venir concurrencer des équipes aux moyens bien supérieurs ? Revue d’effectif. 


Tous les supporters que nous sommes considèrent les Girondins de Bordeaux comme un grand club. L’histoire de notre passion est parsemée d’images auréolées de gloire, celles de Gourcuff survolant la Ligue 1, ou du Bayern battu sur ses terres. Des coups francs de Wendel, de l’aigle des Açores, ou de la fête nocturne de 1999. Pour les plus anciens mêmes, des coups de patte de Zizou, aux courses de Tigana et de Giresse, du grand match contre la Juve, ou de Marius Trésor. 


Mais aujourd’hui, Bordeaux n’est plus sur le toit de l’Europe. A vrai dire, Bordeaux parvient à peine à suivre le rythme du peloton de tête français, dopé par les dollars du foot business. Malgré cela, Bordeaux s’accroche tant bien que mal à son héritage : un centre de formation performant, un staff solide et un organigramme structuré, en plus d’un pouvoir d’attraction somme toute encore conséquent. Car si le public bordelais n’est pas fidèle, il est réel : BeIN programme plus facilement Bordeaux que Guingamp ou Reims.



Le challenge est donc le suivant pour un club dont le statut est remis en cause : ne pas se contenter de limiter la casse (comprendre, se maintenir au-dessus des poursuivants), mais trouver les moyens d’aller concurrencer les gros de notre football moderne : Paris et Monaco, qui concentrent les investissements étrangers, Lyon, qui bénéficie de l’héritage de ses sept titres consécutifs et de la pertinence du modèle économique de JMA, et enfin l’Olympique de Marseille, qui, s’il connaît chaque année des crises médiatiques et footballistiques, s’appuie sur de gros moyens, un grand stade et un public nombreux. Alors que les matchs de Ligue1 viennent de reprendre, ce sont les joueurs et les staffs techniques de chaque équipe qui feront –ou pas- la différence.

Que peut-on alors espérer des bordelais ?


Après être enfin parvenu à évacuer la (quasi ?) totalité des joueurs au contrat-fardeau, ayant tiré l’équipe vers le bas pendant plusieurs années (pensez à Fahid Ben Khalfallah, David Bellion, Matthieu Chalmé, etc…), Bordeaux semble retrouver un effectif compétitif, lavé de l’usure des résultats médiocres de ces dernières saisons par l’apport de joueurs nouveaux et d’une concurrence renouvelée. A part Jussiê ou Abdou Traoré, fraîchement prolongés malgré un apport faible à la performance, peu de joueurs semblent plomber la masse salariale du collectif marine et blanc. Plus que ça, celle-ci semble s’alléger, a posteriori de la récente politique de salaire mise en place par Jean-Louis Triaud. 


Sur le papier, les Girondins n’ont pas à rougir de leur équipe. L’apport de joueurs fraîchement arrivés vient compléter l’éclosion (relative) de joueurs présents depuis plusieurs années. A l’heure où nous écrivons cet article, chaque poste est quasiment doublé. Nous possédons un gardien de niveau européen, remplaçable au besoin par une doublure qui a beaucoup démontré en termes d’assurance dans le chaudron de Saint-Etienne, et dont le caractère promet plus que la technique de l’ex Abze Jug. 


Sur les côtés de la défense, Willy Sagnol met en place une concurrence qui devrait pouvoir tenir sur la première partie de saison. Si Gajic et Guilbert semblent prometteurs, la paire Poundjé-Contento sera peut-être à revoir, bien qu’il faille laisser à l’italo-allemand le bénéfice du doute et du temps d ‘acclimatation. Sous la houle d’un latéral tel que le fut Willy Sagnol, on peut espérer limiter la casse à un poste somme toute moins important que d’autres. 


Au centre, s’il faudra attendre la prochaine recrue pour pouvoir jauger de notre force. La paire Sané-Pallois semble cela dit prometteuse, voire même solide pour la Ligue1, si le sénégalais maintient le niveau que son statut de capitaine exige. L’ancien niortais, quand à lui, confirme tout le bien qu’on a pu penser après sa première saison, et ce malgré quelques erreurs ponctuelles. S’il n’a pas la carrure pour encadrer trois jeunes autour de lui, nul doute qu’avec Lamine Sané ils pourront résister à pas mal d’effectifs de L1. La qualité de relance surprenante de Pallois et la technique de Sané permettront sans doute de pouvoir alterner jeu long et jeu court à la relance. Il semble cependant déterminant de ne pas se tromper lors du recrutement du troisième défenseur central, car Cédric Yambéré a démontré qu’il ne peut pas occuper cette position de premier remplaçant, surtout lorsque la concurrence s’appelle Marquinhos ou Bisevac (après l’arrivée de Mapou Yanga-Mbiwa, ndlr). 


Au milieu aussi, l’espoir existe. Il serait difficile de ne pas partager l’enthousiasme de Willy Sagnol pour le repositionnement d’Henri Saivet. L’ayant déjà apprécié en « box-to-box » contre Larnaca et Reims (contre qui l’on prend deux buts dés sa sortie), que dire de son match face à Saint-Etienne ? S’il a ponctuellement fait preuve de suffisance, comme lors de cette série de dribbles inutile pour éliminer un stéphanois dans son dos, alors qu’il n’avait qu’à remettre en retrait ; sa technique, sa mobilité, son coffre physique, et son culot font de lui un des grands espoirs de notre entrejeu. Il faudra pour Henri apprendre à tenter quand il le faut, et à lâcher la balle aussi, plus souvent. Comme le disait Marc Planus aux jeunes l’an passé, « regardez Jaro’ (Plasil, ndlr) ! Tu contrôles, tu passes ». Mais Henri n’est plus si jeune et devra désormais endosser le statut de cadre de l’équipe. 


A ses côtés, Clément Chantôme semble être un titulaire obligatoire, ne serait-ce que par son statut d’ex-parisien international (1 sélection). Cependant, le milieu semble encore un peu juste dans certaines situations, au niveau du mental, ou de la propreté sur les phases de jeu défensives les plus chaudes. Malgré tout, son expérience et son abattage tant physique que technique sont un apport précieux qui motorise le jeu bordelais, si souvent cantonné aux trente premiers mètres par le passé. Le temps et la confiance lui donneront, on l’espère, les moyens de ses ambitions. 


Car la blessure de Gregory Sertic n’arrange pas nos affaires. Depuis le début de saison, c’est la relance du jeune (et oui, encore jeune) Poko qui l’a fait oublier. Le gabonais semble lui très difficile à juger. Il est indéniablement le joueur le plus travailleur de l’équipe en situation de match, et a démontré une capacité de récupération et de montée offensive remarquable. Son toucher de balle est souvent critiqué mais il a en vérité une bonne gestuelle de dribble, alors que ses contrôles sont incontestablement brouillons, ce qui est sans doute dû à sa mobilité constante. Si son apport face à des équipes plus faibles est incontestable, il faudra le voir à l’œuvre face à de plus grosses écuries. 


Mais seul Plasil semble de toute façon aujourd’hui en mesure de lui chiper sa place de titulaire. Car si le tchèque est un indiscutable, même à son âge (rappelons qu’il était dans le Monaco de 2003-2004 et dans le Bordeaux de 2009), Abdou Traoré, Robin Maulun, ou (soyons fou) Valentin Vada sont trop justes pour prétendre à une place de titulaire, Younes Kaabouni étant prêté. Il y a donc tout de même des solutions au centre, malgré Sertic. Ce dernier est d’ailleurs la raison pour laquelle Willy Sagnol semble de plus en plus opter pour la présence de milieux latéraux, poste pourtant mis aux oubliettes l’an passé. 


A cet exercice, c’est Nico
las Maurice-Belay, un ancien du club déjà, qui récupère du temps de jeu. Mais mis à part l’ex-sochalien, peu de joueurs peuvent occuper cette position. Thomas Touré pourrait briguer une place sur le côté gauche, pour sa qualité de dribble, de percussion, et de frappe du pied droit. C’est donc le flanc droit qui paraît bien dégarni, Poko n’étant pas un spécialiste du poste. Ici, les rumeurs de recrutement les plus récentes viennent confirmer notre analyse, puisqu’alors qu’on annonçait Ferjani Sassi, milieu relayeur tunisien très prometteur, c’est bien Omar Gaber, milieu droit un peu moins réputé, qui a été mis à l’essai, avant même l’arrivée d’un défenseur central.


Reste que le tunisien Wahbi Khazri devrait être à la tête du jeu bordelais. Si son exercice précédent fut excellent, et son adaptation très rapide, on attend beaucoup plus de son début de saison. Sagnol a rappelé ces derniers jours qu’il était en retard dans sa préparation, de par son statut d’international. Il faudra lui laisser plus de temps donc. Pour le suppléer, osera-t-on mentionner Jussiê, absent depuis plus d’une saison maintenant ? Si sa présence ponctuelle est parfois précieuse, elle est, malheureusement, bien trop rare pour être comptée comme une donnée régulière de l’effectif, malgré les rappels incessants de Jean-Louis Triaud qui le considère chaque été comme une recrue… A ce petit jeu, ne serait-il pas bon de récupérer un deuxième meneur de jeu, capable de vraiment concurrencer le tunisien, ou de mettre en valeur ses coéquipiers ? 


Un ange (breton et libre de tout contrat) passe.




Il y a donc bien un effectif fourni au milieu de terrain. Le doute qui subsiste réside dans le système à choisir, puisqu’il n’y a pas assez d’ailiers, ni de relayeurs. Mais Sagnol est un adepte du changement, et tant Poko que Saivet sont polyvalents. Deux joueurs qui seront d’ailleurs les facteurs x de la réussite de l’entrejeu bordelais, leur régularité sur une saison à coupe d’Europe restant à démontrer. Il est cependant intéressant de constater l’apparition de ce duo, qui correspond à un schéma de plus en plus prisé dans le football moderne : un milieu puissant, percutant, et endurant, associé à un autre technique, créateur, et organisateur (pensez Matuidi-Verratti, toute proportion gardée). On peut aussi compter sur le jeune Maulun pour étaler ponctuellement des qualités entrevues en préparation.


En attaque enfin, et c’est bien la première fois, l’effectif semble irréprochablement fourni. Entre Cheick Diabaté, efficace au possible depuis plusieurs années et enfin libéré de son genou piégeur, Diego Rolan, estimé par son entraîneur et son président à 30 millions d’euros, Isaac Kiese Thelin, fraîchement champion du monde espoir et entamant sa première saison complète, voire même Thomas Touré selon la répartition des postes, Bordeaux dispose d’attaquants à la pelle. Leurs profils permettraient en plus de pouvoir former deux doublettes, avec un attaquant d’appui et un de profondeur. Cela étant, le grand Cheick a encore peu démontré cette année, il faudra pour lui aussi du temps pour retrouver ses sensations. En attendant son homologue suédois a l’air disposer à faire valoir la concurrence. Et n’oublions pas Enzo Crivelli, qui devrait se voir confier le rôle de réserviste de luxe, après avoir affiché une belle volonté et un gros volume physique la saison dernière. -----



En somme, Bordeaux a cette année une équipe fournie. La capacité de celle-ci à transcender un club à moyen budget dépendra des promesses entrevues chez certains joueurs, qui pourraient être l’élément déclencheur d’une saison où il faudra apprendre vite de ses erreurs. Le club et ses dirigeants auront aussi un rôle majeur à jouer, dés aujourd’hui avec la finalisation du recrutement (un défenseur et un milieu a priori), mais aussi tout le long de la saison, où il faudra constamment stimuler le mental d’un groupe souvent laxiste. La jeunesse de la majorité des joueurs sera parfois un atout, parfois un obstacle. Mais, au fond, la vraie force des girondins sera d’avoir conscience de ses faiblesses. Car le staff, les infrastructures, la formation, tout à Bordeaux est la résultante de réussites passées, qui auront laissé des ambitions et une exigence que nos résultats récents auront vexées. Willy Sagnol le premier est un entraîneur ambitieux, lucide, et rationnel. On espère qu’il saura tirer le maximum de son groupe, et de son club qui a vu en lui un second Laurent Blanc. Après la catastrophe Tigana et la débâcle post-cévenol, le club avait misé sur Francis Gillot, à raison, pour remettre les girondins sur leurs pieds. Aujourd’hui, la mise est sur l’ex-bavarois, pour relancer le club dans le grand bain. Et il ne vaudrait mieux pas se tromper, car nos jetons se font de plus en plus rares…

Olivier.P

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