Entretien avec Didier Tholot : "Ce n'est pas un voyage touristique pour voir le Matmut"

09/11 - 09:18 | Il y a 2 ans
L'entraineur du Pau FC, Didier Tholot, était en direct dans le Talk sur WebGirondins avant son match face aux Girondins de Bordeaux samedi à 19h. Bordeaux reçoit Pau pour la 15e journée de Ligue 2.
Entretien avec Didier Tholot : "Ce n'est pas un voyage touristique pour voir le Matmut"

© Iconsport

Retrouvez l'interview de l'équipe Talk, ainsi que la vidéo de cet entretien en bas de page.


"Je suis impatient d'y être car j'aime ce club"



Comment fait-on quand on perd des joueurs clés à l'intersaison pour reconstruire aussi vite un groupe, un collectif, et être rapidement 10e de Ligue 2 ?

Didier Tholot (entraÎneur du Pau FC) : On a beaucoup travaillé. Il faut savoir qu'on a recruté à peu près 15 joueurs. J'étais parti dans l'idée de jouer en 4231. Il faut savoir qu'on a perdu entre temps notre capitaine Batisse. On a fait pratiquement que des paris sur les nouveaux joueurs par rapport à notre budget. On a pris des joueurs qui n'ont pas eu assez de temps de jeu lors des années précédentes.

Donc il faut travailler et essayer d'assembler un puzzle qui ne prend pas au départ. Le déclic est arrivé à Quevilly Rouen ou je me suis dit qu'on n'y arriverait pas dans ce système. On a retravaillé un schéma différent avec trois défenseurs, une pointe basse afin de ressortir le ballon très proprement avec Heni Saivet. On a enchainé nos résultats avec nos moyens, avec la volonté de vouloir jouer et en étant plus solide (NDLR Pau est sur 4 victoires consécutives avec la Coupe de France)

Comment se passe ta réflexion quand tu décides de changer de système ? Est-ce qu'il y a des échanges avec des joueurs ?

Quand je décide de changer, je l'avais dans ma tête depuis un ou deux matchs. J'ai discuté avec certains joueur et notamment avec Henri. L'idée au départ était de le faire jouer Henri Saivet plus haut. Après avoir discuté avec lui, les meilleures saisons qu'il a fait c'était dans ce rôle-là, un peu plus bas. J'avais deux jeunes très bons comme Ruiz et Sow.

À Caen, je lance Sow qui n'avait jamais fait un match de Ligue 2. Ce qui m'intéresse c'est de mettre les joueurs dans les meilleures conditions pour qu'ils puissent exploiter leur potentiel au maximum.

Face à Amiens le week-end dernier plusieurs joueurs ne jouent pas à leurs postes de prédilections. Tu as des joueurs qui n'ont pas l'expérience de la Ligue 2 et tu as réussi a trouvé une attitude collective assez impressionnante. Comment faire ce collectif cohérent avec des joueurs qui ne jouent pas à leur poste ?

Ce week-end c'était particulier car j'avais des joueurs suspendus. J'ai dû changer des positions. On a la volonté de jouer. Bien sûr qu'on est inférieur à certaines équipes en potentiel. Mais il y a l'idée d'être solide avec la volonté de jouer au ballon.

Ce qu'on met en place est répété depuis des semaines, avec des schémas, des sorties de balles, des jeux à thèmes. J'ai un groupe de 20 joueurs, pas plus. Aujourd'hui, pas une seule fois dans la semaine un joueur n’est laissé de côté. Le joueur connait les schémas et quand il rentre il sait ce qu'il doit faire.

Comment convaincre un joueur de changer de poste ? Est-ce que vous travaillez avec de la vidéo, de la data ? Quels leviers utilisez-vous ?

Quand on parle de Noe Sow et Jean Ruiz, je n'ai pas menti. Je leur ai dit qu'ils partaient en positionde numéros 3 et 4, mais qu'ils auraient une chance. Ils ont été performants et ils ont joué. Henri, j'ai discuté avec lui. Il n'a plus la même vitesse qu'avant. Ce poste-là lui va bien, c'est un vrai patron du milieu de terrain.

Quand je mets Beusnard en 8, je discute avec lui et je lui montre des vidéos. C'est la même chose pour Sylvestre. La première année, pendant 6 mois il a dit que je ne l’aimais pas. Aujourd'hui, Beusnard et Sylvestre prennent beaucoup de plaisir au cœur du jeu. L'entraineur est fait pour ça, mettre ses pions aux bons postes.


"J’ai beaucoup de respect pour l'ensemble du club, de cette équipe et de ses supporters"



Est-ce que l'équipe des Girondins de Bordeaux n'est pas trop prévisible dans son organisation et sa composition ?

Non. Je suis un peu pareil. Quand tu es en haut du classement et que ça marche bien. Pourquoi tu irais changer des choses qui te permettent de gagner ? C'est logique. Il y a un système assez immuable et il marche bien. Moi j’ai changé par rapport à mon mauvais début de championnat, à des blessures et des suspensions. Après il y a aussi des manières d'évoluer dans le match qui peuvent être différentes. Très peu de joueurs aux Girondins ont un vécu en Ligue 2 et Ligue 1.

Le football est aussi fait d'expérience. Le classement de Bordeaux si on lavait dit à tous avant le début du championnat personne ne l'aurait imaginé. On devient plus exigeant avec les résultats. Il ne faut pas oublier que cette équipe bordelaise est jeune et que cela pend du temps.

Comment prépares-tu ce déplacement à Bordeaux ?

De la même manière que pour les autres matchs. Même si pour moi et deux, trois joueurs c'est particulier. Nous on fait partie des petits clubs. On ne se prend pas pour d'autres, on sait que ça va être très compliqué à Bordeaux. Bordeaux aura une pression importante car ils viennent de perdre la première place. Nous on a pris 20 points. On y va l'esprit libéré.

Je suis aussi un compétiteur, et je vais mettre en place des choses. Ce n'est pas un voyage touristique pour voir le Matmut. On va tout faire pour embêter cette équipe de Bordeaux, même si j’ai beaucoup de respect pour l'ensemble du club, de cette équipe et de ses supporters.


"Nous avons 7,5 M€ de budget. L'objectif est clairement le maintien"


 

Vous êtes en confiance, Bordeaux est un peu dans le dur, est-ce le bon moment pour jouer contre les Girondins ?

Je ne sais pas si c'est le bon moment, nous on aurait signés des deux mains pour aller à Bordeaux avec 20 points. Il y a 7 points d'écart entre nous et les Girondins. Imaginons que nous faisons un résultat très positif, ce serait une énorme performance. L'objectif de Pau en Ligue 2 est clair. Cette saison il y a 4 descentes et deux montées. Il y a 8 clubs qui veulent monter, et le reste va se battre pour ne pas descendre.

Nous avons 7,5 M€ de budget. Nous, on a un analyste vidéo, un adjoint et un préparateur physique, on est 4. L'objectif est clairement le maintien. Ce que nous faisons à Pau depuis deux saisons, c'est marquant. Des fois on est obligé de beaucoup défendre. Je pense qu'il faut provoquer la réussite.


"Je dors très bien aujourd’hui"


 

Justement, avec ton accomplissement comme entraineur et ce que tu as fait est-ce que tu aimerais travailler avec plus de moyens ?

Ça ne me fait plus rêver. Je suis venu à Pau alors que j'avais une proposition de Sion pour jouer la première division suisse. Le président m'a envoyé un contrat ou je mets tout ce que je voulais. Mais je n’y suis pas allé. Car à Pau il y avait l'idée de construire un club. J’ai ma maison à Bordeaux, mes enfants aussi, ma femme peut venir. Cette qualité de vie me permet d'être bien.

Je ne cours pas après quelque chose. Je veux rétablir quelque chose. On m’a posé la question à savoir si j'aimerai entrainer Saint-Étienne et Bordeaux. J’ai dit oui car ce sont mes deux clubs de cœur. Mais ça en est resté là. Si j'ai une opportunité en Ligue 1 ou à l'étranger je l'étudierai en fin de saison. Je dors très bien aujourd’hui.

Ta dernière visite au Matmut Atlantique était positive, quels souvenirs en gardes-tu de ce match avec Sion ?

J'en garde un très bon souvenir même si on avait beaucoup défendu et gagné 1 à 0. Le kop de Sion avait scandé mon nom et le kop de Bordeaux aussi de l’autre côté à la fin du match. Bordeaux reste Bordeaux.

J’ai vécu les meilleurs années de ma carrière. Il y avait une communion avec le public. Je l'ai dit à mes joueurs, c'est un match a jouer dans un stade plein avec un kop fabuleux. C'est beau et ça fait partie de notre métier. Il faut prendre d’un plaisir. C'est génial, je suis impatient d'y être car j'aime ce club. Mais aussi pour voir la prestation de cette équipe.