Exclusif : Xavier Gravelaine se confie sur Bordeaux en N2 et le match face aux Girondins

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Gravelaine sur Bordeaux en N2 : "Un ovni dans le paysage amateur"
WebGirondins : Savez-vous si cette rencontre face aux Girondins de Bordeaux en ouverture du championnat va se jouer ce samedi 16 août ?
Xavier Gravelaine : je suis en relation avec le directeur général des Girondins de Bordeaux, Arnaud Saint-André à ce sujet. On sait que les températures vont être élevées aux alentours des 40°C samedi à Bordeaux. La préfecture de Gironde, si elle doit prendre une décision, le fera vendredi. Nous avons la problématique du déplacement avec Avranches, car nous serons sur la route en car dès vendredi pour venir à Bordeaux. On ne veut pas faire un aller-retour un 15 août pour ne pas jouer. Nous sommes en contact constant avec le club bordelais et la FFF. On étudie toutes les possibilités de report ou décalage du coup d’envoi. C’est complexe, car il faut penser au bien-être des joueurs et des spectateurs.
Pourquoi vous êtes-vous reconvertis comme directeur sportif ou manager général, qu'est ce qui vous attire dans ce métier ?
Ce qui m'attire c’est le projet. J’ai entraîné pendant 6 mois en Ligue 1 (Istres en 2005), mais ce qui m’intéresse c’est de construire. J'ai eu la chance de le faire au SM Caen(2014-2018), de faire de la restructuration au FC Nantes (2007). C'est la deuxième fois que je reviens à Avranches. On est l'un des meilleurs clubs amateurs, avec ce qu’a mis en place depuis 30 ans Gilbert Guérin avec les bénévoles, j’ai envie de construire ce projet. J'ai commencé dans le monde amateur, je suis passé dans le monde professionnel et je terminerai dans le monde amateur dans quelques années et la boucle sera bouclée.
Ce projet d’Avranches me tient à cœur avec 10 années passées en National 1 avec le travail de Gilbert Guérin. Je vais essayer de faire perdurer tout ça avec notre gros sponsor.
Quel est ce gros sponsor dont vous parlez ?
Ce sont les Maitres Laitiers du Cotentin et la famille Fortin. Je suis toujours lié à la famille Fortin depuis notre passage à Caen de 2014 à 2018 où nous avons fait évoluer le club (Xavier Gravelaine était DG et Jean François Fortin le Président). Je suis resté fidèle aux Fortin depuis 10 à 12 ans. J’en suis fier. On est un peu hors business. On est sur des valeurs régionales avec des sentiments qu'on ne voit plus dans le football. On travaille ensemble.
Quel est votre rôle à l’US Avranches ?
Cela va faire deux ans que Gilbert Guérin est décédé (23 octobre 2023). Je suis là depuis 3 ans comme Directeur sportif et coordinateur sportif jusqu'à 15 ans. Nous avons décidé cet été de partir sur un projet de 3 ans basé sur les jeunes de la formation. Nous avons décloisonné les catégories chez les jeunes pour les faire progresser. L'avenir du club passe par eux. Cette saison nous avons fait monter 6 joueurs en N2. Nous avons l’envie de les garder et de les faire progresser en les entraînant sur les catégories supérieures. On prépare ainsi les 3 prochaines années.
Est-ce que ça ressemble au monde professionnel que vous avez connu ?
Le monde amateur est différent d’une structure professionnelle. On a un petit budget (1,6M€), mais ça me plait. Je suis bien installé en Normandie. Avec le président on va aussi chercher les sponsors, et je touche à tout avec mon réseau. Je fais le maximum avec plein d’idées marketing. Aujourd’hui, on est en train de renouveler nos bénévoles. Il y a énormément de choses à faire. Je déborde de mon rôle de directeur sportif par amour pour le projet.
Quelle est votre méthode de recrutement des joueurs ?
J'utilise mon réseau. Les joueurs sont de plus en plus exigeants. Ils vont devoir comprendre que l'âge d’or est passé avec la chute des revenus des clubs. Ce qui coûte cher au club c’est de surpayer des joueurs moyens.
Je remarque une nouvelle tendance avec des joueurs qui veulent partir à l’étranger. Six mois après, ils veulent tous revenir pour des raisons économiques ou sportives. Les joueurs ne doivent pas oublier une chose. S' ils ne jouent pas pendant 6 mois à un an, ils perdent tout crédit dans le foot moderne. Ils doivent jouer. Je passe mon temps à l’expliquer à certains jeunes et c’est difficile de leur faire comprendre. Il vaut mieux descendre d’une division et jouer que de rester au chômage. On est parti sur 2 à 3 années compliquées financièrement pour les joueurs.
Le club voisin d'Avranches de Granville a été repêché, qu'en pensez-vous ?
On est le premier club dans la Manche. Je suis content que Granville soit repêché, car, il y a deux ans, ils avaient joué la montée, même si la saison dernière a été difficile pour eux. On est des gens simples, on ne dépense pas l’argent qu’on n’a pas. Granville est un club sain et sympa, même s’il y a de la concurrence. Dans le Calvados et la Manche, il y a eu beaucoup de dégâts en N3. Ça devient très compliqué pour les clubs amateurs.
"Remonter en N1 dans 2 à 3 ans"
Pourquoi avoir choisi Cédric Hengbart pour conduire l’équipe cette saison en National 2
C’est un choix qui correspond à ce projet. Il convient à notre mentalité. Je le connais depuis longtemps, il est passé par Caen et connaît les Fortin. On a de très bonnes structures d’un niveau presque de Ligue 2 et le centre d'entraînement nous appartient. C’est important pour sa production. Il est sous contrat pour deux saisons et une en option. Il n’en a pas fait une affaire financière, et il pouvait choisir un autre club.
Vous le suiviez depuis longtemps ?
Oui, comme d’autres entraîneurs. Il a un vrai projet de jeu partout où il a entraîné. Il a fait des miracles à Blois et produit un jeu agréable. S' il avait eu un meilleur terrain à Blois, il aurait terminé dans les trois premiers du championnat. Nous avons deux à trois ans pour faire quelque chose et remonter. Il sait polir les jeunes, ce qui convient à notre projet.
La conception de son football colle parfaitement à notre projet. On s’entend à merveille et on parle de tout. Nous avons des relations classiques, les entraîneurs entraînent, et je déblaie tout ce que je peux en amont pour l’aider. Je l'appuie quand il le faut.
Est-ce difficile de retenir vos jeunes joueurs ?
On se fait piller nos U17N et U19N. L’objectif c’est de montrer aux jeunes que c’est possible de progresser avec nous. Cédric est un très bon manageur. C’est mon dernier projet, je n'irai pas au-delà, 3 ans ou 5 ans. Je veux pérenniser ce qu’a fait Gilbert Guérin en structurant. C’est la création qui m’intéresse et Cédric à toute ma confiance et celle du club.
La Ligue 3, les petits clubs et l’avenir du foot français : le plaidoyer de Gravelaine
Que pensez-vous de l’arrivée Ligue 3 ?
C'est un progrès qui arrive en 2026-2027. Cela aurait dû être fait plus tôt. Quand nous étions en National 1, nous avions plus de charges en tant que club amateur que des clubs professionnels. Cela va harmoniser les statuts.
(Il ajoute)
Il ne faut pas oublier le monde amateur, car c’est le vivier du foot français. Le football est universel. Il y a 60 clubs pros et le reste, ce sont des clubs amateurs. J’ai toujours eu des actions pour aider le football amateur quand je travaillais dans le monde professionnel. Ce n’est pas 60 clubs professionnels qui font vivre le football français. C’est le terreau du football professionnel. Les grands clubs doivent montrer l’exemple, mais cela s’est perdu ces derniers temps.
Que pensez-vous du niveau du championnat de National 2 ?
Le niveau monte, c’est au niveau du National 1 deux ans auparavant. La restructuration de la N3 et la N2 va faire encore monter le niveau de jeu. Ce qui me fait peur c’est qu'on oublie les petites villes au profit des grandes villes, et villes moyennes. Avranches c’est 8500 habitants et 490 licenciés. Nous calculons au centime près. Je me battrais jusqu'au bout pour les petits clubs. Ils n'auront plus que la Coupe de France pour être en lumière. La N1 vient recruter les meilleurs joueurs de N2, et la N2 va recruter les meilleurs joueurs de N3.
"Le club, la ville et les supporters de Bordeaux méritent un club qu joue plus haut"
Que pensez-vous de la présence des Girondins de Bordeaux en N2 ?
Les Girondins de Bordeaux n’ont rien à faire en N2. C’est un ovni. Cela restera un grand club et je leur souhaite le meilleur. Beaucoup de clubs sont surpris de les voir dans cette division. J’ai suivi la saga bordelaise, c’est un feuilleton tous les ans. Quand on voit les chiffres, et que ça repart quand même… beaucoup de clubs amateurs se demandent comment c’est possible. De plus, quand ils se déplacent dans nos stades, cela nous coûte cher en sécurité, car il faut gérer l'antagonisme entre les deux groupes Ultras de supporters.
Pour l'attractivité du championnat, est-ce positif ?
C’est toujours bon d’avoir de grands clubs. Ça amène du monde, car ça reste Bordeaux. C’est super de les recevoir et de jouer au Stade Atlantique. Mais on voudrait que, nous aussi, les clubs amateurs ne nous embêtent pas pour 40 000€ de déficit. Les grandes villes sont privilégiées par rapport à nous. Il ne faut pas oublier que la fourmilière du football français, ce sont les clubs amateurs. On ne bataille pas dans la même cour.
Bordeaux annonce jouer la montée
Si Bordeaux ne monte pas cette année en N1, cela va être compliqué pour eux. Est-ce qu'il n’aurait pas fallu que ça casse comme Strasbourg pour mieux repartir ? Je serai le plus heureux du monde de revoir Bordeaux en haut. Le club, la ville et les supporters le méritent.
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