Interview - Matthieu Chalmé : "J'ai eu une conversation avec Admar Lopes"

15/03 - 18:00 | Il y a 2 mois
Entraineur adjoint dans le staff de Laurent Guyot au FC Annecy, prochain adversaire des Girondins, Matthieu Chalmé nous parle de son rôle d'adjoint, de la forme du FCA, de sa sortie médiatique remarquée l'été dernier lors de son départ du Haillan, avec un focus sur la réserve bordelaise en difficulté. Franc et direct, il a répondu aux questions de WebGirondins.
Interview - Matthieu Chalmé : "J'ai eu une conversation avec Admar Lopes"

© Iconsport

WebGirondins : Comment allez-vous Matthieu ?

Matthieu Chalmé : tout va bien. Nous nous sommes bien acclimatés à la région avec ma famille. Ma vie se passe très bien. Nous sommes heureux pour une nouvelle aventure qui a démarré depuis 7 mois. On espère pouvoir y rester un petit moment.

Vous découvrez cette saison un poste d'adjoint dans un staff de Ligue 2, comment l' avez-vous abordé ?

De la meilleure manière possible. Je sortais de la formation et je venais d’avoir mon diplôme d'entraîneur professionnel. Cela faisait un an que je savais que j’allais partir des Girondins. Je m’étais ouvert à plusieurs opportunités. Laurent Guyot (entraîneur du FC Annecy) m’a appelé. C’était pour moi une manière de continuer à apprendre. Humainement, c’est quelqu'un de top, il est expérimenté, et a beaucoup de valeurs. Je n'appréhendais pas de redevenir adjoint. Le contact est passé de suite. Je suis ravi d'être à ses côtés et d’apprendre chaque jour. J’espère que la suite nous permettra de travailler ensemble l’année prochaine en Ligue 2 avec Annecy.

"Aujourd’hui, je suis focus, et très attaché à Laurent Guyot"

Quel est votre rôle dans le staff de Laurent Guyot ?

On est deux adjoints. On doit faire en sorte qu’il arrive frais sur les matchs. On lui enlève des tâches quotidiennes permanentes. Il nous donne l’idée directrice, puis on anime et on crée les séances. Ça se passe très bien et je suis très content de mon rôle. Je partage mon expérience d’ancien joueur et de jeune coach pour trouver la meilleure formule afin de nous sortir de cette 19e place en championnat.

ICONSPORT_181862_0007.jpg (147 KB)
@iconsport

On peut dire que ce rôle correspond bien à vos attentes ?

Oui, car je n'étais pas prêt à prendre une équipe en pro. Je venais juste d'être diplômé et je me posais des questions. Je voulais continuer d'entraîner, Laurent Guyot m'a permis de continuer à ses côtés. On s’entend très bien, il me fait confiance, et il me demande beaucoup mon avis comme à l'ensemble du staff. J’aime ce genre de management. C’est l'idéal pour que je continue à progresser et peut-être prendre une équipe dans le futur. Aujourd’hui, je suis focus, et très attaché à Laurent Guyot.

"Le projet est de prendre une équipe à moyen terme si j’en ai l'opportunité"

En quoi le métier d'entraîneur adjoint dans un staff de Ligue 2 est différent de celui d'entraîneur d'une équipe d’un centre de formation comme vous l’étiez à Bordeaux ?

Oui, c’est différent. En formation, vous devez préparer des joueurs à aller jouer en équipe première le jour ou on fait appel à eux. La priorité est la progression des jeunes joueurs. Aujourd’hui, en Ligue 2, la priorité ce sont les résultats. On travaille au quotidien en rapport avec un match et notre projet de jeu. J’avais déjà vécu une expérience d'adjoint avec Ulrich Ramé et Pierre Espanol pour sauver l’équipe pendant deux mois (en 2016, NDLR). Je commençais à passer mes diplômes. Je me suis rendu compte qu'entrainer à la formation et être entraîneur en professionnel c’est un métier différent. Les deux me correspondent. J’étais très bien avec la réserve des Girondins et les U19 Nationaux car j’aime voir l’évolution de nos jeunes. L’approche est différente et j’apprécie les deux postes.

Matthieu, quel est votre projet professionnel, votre souhait pour les mois, années à venir ?

J'avais besoin de découvrir le monde professionnel comme entraîneur ou entraîneur adjoint. J'ai passé mes diplômes en ce sens. Aujourd'hui, ça me plait, et si dans deux, trois ans ça me plait plus j'arrêterai. J’aime transmettre et vivre au quotidien avec les joueurs, partager avec les nouvelles générations. Le projet est de prendre une équipe à moyen terme si j’en ai l'opportunité.

"Ce sera un match difficile face aux Girondins, on est prêt à répondre à ce combat"


Dans quel état de forme et d’esprit est le FC Annecy avant la réception des Girondins ?

On n’a plus le choix, il faut emporter des matchs pour s’en sortir et espérer se sauver. On le sait. Après un bon début de saison, on a eu des difficultés en décembre et janvier. Les matchs étaient cohérents, mais le résultat pas suffisant. On n’a pas été assez efficace. On sort d’une belle prestation à Ajaccio. L'objectif est d’enchaîner chez nous face aux Girondins. Les joueurs n’ont pas lâché. On est dans le sprint final et on sent les joueurs très investis pour se sortir de cette situation. Ce sera un match difficile, on est prêt à répondre à ce combat.


Quels sont les éléments positifs qui vous permettent de croire au maintien du FCA ?

C’est notre match abouti à Ajaccio (victoire 3-1) qui était invaincu à domicile. On sent le potentiel, même si on manque de régularité dans la finition. On travaille beaucoup sur ce point. On espère que ça va tourner. Quand vous gagnez à Ajaccio, ça vous donne confiance. De plus, on a recruté des joueurs au mois de janvier qui avaient peu de temps de jeu, ils commencent à trouver le rythme, on le sent. On assemble un puzzle pour se sauver.

"Quand vous êtes un enfant du club et que vous voyez une mauvaise direction qui est prise selon moi à la formation, vous ouvrez les yeux aux gens et vous alertez"

Votre interview en juillet dernier au quotidien Sud-Ouest avait fait du bruit (lire ici), avez-vous eu des retours après cette sortie médiatique ?

Oui, j’ai eu une conversation avec Admar Lopes par message. Je comprends qu’il puisse mal le prendre. J'aurais aimé leur dire en face, mais je n’ai jamais été reçu. C’était mon ressenti à l'instant T pour l'intérêt du club. Quand vous êtes un enfant du club et que vous voyez une mauvaise direction, selon moi, qui est prise à la formation, vous ouvrez les yeux aux gens et vous alertez. Les discours que j’ai pu entendre ou lire, ce n'était pas en adéquation avec ce qui se passait. Ma prise de parole n'était pas la rancœur d’une personne qui n'est pas prolongée. Lorsque vous vous faites sortir de la réserve alors que vous terminez 4e, que vos joueurs montent en pro avec succès, et que vous êtes écarté sans raison à deux jours de la reprise de manière pas très correcte, vous savez très bien un an plus tard que vous ne serez pas gardé. Je pratique le milieu depuis assez longtemps pour savoir comment cela se passe. Je m’étais préparé.

"Je ne souhaite que le bien aux Girondins de Bordeaux, car il le mérite"

 

J’aurais aimé que les choses se passent bien, car je suis franc et entier. Ils sont propriétaires du club, ils font ce qu'ils veulent. Je suis toujours les Girondins de Bordeaux, je leur souhaite le meilleur, mais je suis en droit de dire ce que je pense. Je l’ai dit à Admar Lopes par message. Au match aller, cela s’est très bien passé. Je n’en veux à personne aujourd'hui. On voit aujourd’hui les difficultés de la réserve depuis deux ans (relégable), quand vous avez terminé 4e avec la réserve, on peut penser qu’on ne faisait pas un si mauvais travail avec le staff. La direction des Girondins pensait autrement, ils auraient pu agir autrement. C’est mon droit de le penser. Ce club-là à l’instant T ne me ressemblait plus. Je suis entré aux Girondins de Bordeaux à l'âge de 10 ans, je sais de quoi je parle en termes de travail, on m’a appris les valeurs des Girondins. Les personnes qui l'ont pris pour elles, je me suis expliqué avec elles, j'aurais pu dire ce que je pense aux personnes en face si elles m'avaient reçu. Je ne souhaite que le bien aux Girondins de Bordeaux, car il le mérite.

"La réserve des Girondins en N3 doit jouer le Top 5 chaque année, il n’y a pas de discussion possible"

Comment expliquer que la réserve des Girondins de Bordeaux soit en position de relégation deux années de suite ?

Chacun est différent et chaque méthode est différente. J’ai des échos de ce qui se passe et des ressentis. Ce n’est pas ma manière de voir les choses. Un bon entraîneur est arrivé cette année en réserve. Ça à l'air de ne pas prendre. L'année dernière, il y avait d'autres difficultés aussi. Je suis surpris de ces résultats-là. Je n'ai pas d’explication à donner, car ce n’est pas moi l'entraîneur. Ce n'est pas une question de jeunesse, la réserve a toujours joué jeune et s'est toujours sortie. La réserve des Girondins en N3 doit jouer le Top 5 chaque année, il n’y a pas de discussion possible. Ce serait une mini catastrophe de les voir en R1 l’année prochaine.

Je suis touché par ça depuis deux ans, car des choses auraient pu être faites différemment. Il y a un responsable du sportif au club (Admar Lopes, NDLR) et au centre de formation (Romain Ferrier, directeur technique, NDLR) pour dire leur ressenti. Ce n’est pas à moi, à Annecy, de juger les choses. Je me suis fait sortir pour diverses raisons sur lesquelles je n'étais pas d'accord, je me dis aujourd’hui qu’on est bien gentil avec la réserve. Quand je vois l’équipe féminine qui est relégable, et l’équipe première qui n’est pas à sa place, ça me touche aussi, car je suis attaché à ce club. Ça ne marche pas comme ils le voudraient et comme nous en tant que supporters nous le souhaitons.

Certains clubs professionnels suppriment leur réserve, est-ce un bon choix selon vous ?

Pour supprimer une réserve, il faut avoir un budget pour qu'elle fasse plein de matchs amicaux durant la saison. Je pense que ce n'est pas le cas aujourd’hui. Monaco l’a fait et le PSG aussi, leurs groupes élites font de gros matchs en France et en Europe. Je ne suis pas certain que ce soit mieux. Nos jeunes aujourd'hui rencontrent des joueurs de 25 à 34 ans, ce qui les prépare au monde professionnel. Il y a de belles équipes en National 2 et 3, cela se structure de plus en plus. Je ne verrai pas l'intérêt pour les Girondins de la supprimer. J’ai aimé le championnat de National 3 et 2, ils sont très formateurs. c’est bien d’avoir une réserve et de pouvoir piocher dedans

La passerelle entre les U19 Nationaux et les pros est-elle trop importante ?

Je vous garantis qu’il y a un sacré écart. Pour les Girondins, je trouve que la marche est trop grande. Il faut une équipe intermédiaire. En U19N, les garçons ne sont pas prêts à aller en pro. Il faut soit une réserve, soit un groupe élite. En groupe Élite ce ne sont que des matchs amicaux. Il est ou l’esprit de la gagne ? Les Girondins de Bordeaux c’est la culture de la gagne. En jeune aux Girondins de Bordeaux, on m'a inculqué la gagne. Il fallait gagner. Si je n'avais eu que des matchs amicaux avant de monter en pro, est-ce que j'aurais su cette culture de la gagne ? Je me pose la question.

Nicolas Pietrelli

Note : Matthieu Chalmé a été champion de France 2009, vainqueur de la Coupe de la Ligue 2009, et des trophés des champions 2008 et 2009 avec les Girondins de Bordeaux.

Le podcast de l'entretien à écouter ici :